Je suis pas en phase avec ma vraie identité

Je suis pas en phase avec ma vraie identité

Non, cet article ne traitera pas de trouble mental. Enfin, je ne crois pas. Il ne parlera pas non plus de ma « double vie » de blogueuse. Mais d’un phénomène de dissociation ou je ne sais quoi. Je ne phase pas. Je veux dire je suis une femme de 42 ans mais dans ma tête… paaaas du tout. Petite trentaine tout au plus. Alors oui, l’âge n’est qu’un chiffre, faut rester jeune dans sa tête. Tout ça, tout ça. Sauf qu’en n’étant pas en phase avec qui je suis réellement, je me demande si je rate pas deux ou trois trucs. 

Je ne suis pas en phase avec ma vraie identité
(c) Omid Armin

A la base, j’ai un âge bien sympa

La quarantaine, je trouve ça satisfaisant. C’est un âge où la société s’intéresse moins à toi. Surtout que je ne me suis pas reproduite donc je ne coche pas la case mum, adorée des marketeurs. Et justement, à 42 ans, on me demande moins quand est-ce que compte me reproduire. Maintenant, c’est plus « mais tu regrettes pas ? ». Alors au vu de mon éco-dépression, comment te dire ? Et puis c’était plus facile de lâcher mon taf nul quand la moitié de mes revenus ne part pas dans la survie, l’éducation et le bien-être de mon petit. Il me semble. Démission accueillie côté parental d’un « oh, tu dois savoir ce que tu fais. » Le pouvoir de la quarantaine, ça. Je n’attends plus grand chose de la vie : la ménopause et un job moins toxique. Pour le dernier point, OK, il semble que les fées qui se sont penchées sur mon berceau aient décidé d’être taquines sur le sujet. Mais je travaille avec ma psy pour lever mon intime conviction que je tomberai toujours sur des jobs de marde. Enfin, des N++ de marde, surtout. 

Mais je ne me phase pas

Mais j’oublie. J’oublie mon âge. Quand je me vois dans la glace, je vois une jeune adulte. Le choc quand mes tempes ont blanchi et pas qu’un peu. Mon visage, lui, ne bouge pas trop. Assez peu de cernes, pas de ride sur le front ou autour de la bouche, juste quelques tâches de soleil par ci, par là. Ce n’est que quand je regarde de vieilles photos que je vois une différence. Genre, là, ma mère m’a donné quelques photos de moi, notamment prises lors du mariage de ma cousine il y a 20 ans. J’étais stupéfaite de me découvrir avec un visage aussi lisse. Mais lisse, lisse genre le visage de ma nièce de 2 ans. Pour ne pas prendre une autre partie de l’anatomie pouponne. J’oublie mon âge même si mon corps commence un peu à me le rappeler. Hypertension, bidou qui a désormais sa vie propre et… il est bien loin, le temps où je dormais 5h par nuit. Je ne tiens quasiment plus l’alcool et tout mon sport de l’été m’a laissé une hanche un peu douloureuse. 

Je n’ai plus trente ans…

Et pourtant. Vendredi, en allant faire mes courses, je croise une femme, la quarantaine. Je la scrute un peu car elle me fait penser à une amie du collège-lycée qui, je le sais, vit dans le coin. Alors que je commence à me dire qu’elle a pris un bon coup de vieux, je percute. Bah non, elle a juste 42 ans. Comme moi. Bon, je ne saurai jamais. Autre effet de bord : je regarde un peu une chorale que j’envisage de rejoindre dans ma ville. Envisage parce que pour le moment, je focuse sur mon apprentissage. Je regarde les photos et je chouine un peu : rohlala, non, ce ne sont que des vieux. Enfin, les plus jeunes ont carrément mon âge, en fait. Mais ça ne veut pas rentrer dans le crâne : je n’ai plus trente ans.

Je n'ai plus 30 ans
(c) Tim Cooper

Mais je ne fréquent que des jeunes, aussi

Faut dire que j’ai toujours pataugé dans des milieux jeunes. Dans les agences marketing, on est plus dans la fin vingtaine, petite trentaine. Dans mon dernier taf, la moyenne d’âge, c’était 27 ans. Et je l’ai salement ressenti. Dans mon équipe, la deuxième plus vieille a fêté ses 30 ans quand j’y étais. Je me sentais tellement déphasée et un peu mise à l’écart. Ils faisaient des soirées jusqu’au bout de la nuit quand je rentrais sagement à 23h. Forcément, j’ai 42 ans et un amoureux que j’ai hâte de retrouver. J’ai passé l’âge. J’ai passé l’âge. Semaine dernière,  j’arrêtais pas de parler de mon âge avec ma psy du travail, quand on dessinait les contours de ma prochaine entreprise. Pas de start-up, pas de jeunisme, pas d’afterwork limite obligatoire. Si je veux boire, je préfère le faire chez moi avec mon mec plutôt que dans des soirées où tu sens que tu détones un peu. Malgré toi, malgré eux. Que tu n’es ni sur Tiktok ni sur BeReal et que tu ne te sens aucune envie d’y aller. Que ton avis sur Tinder n’est basé que sur les témoignages que tu as pu entendre et c’est franchement pas reluisant. Et de toute façon, tu as raté plein de soirées donc quand on part en “hé, tu te souviens l’autre fois, on était déchirés, aaaaah”. Bah non, tu t’en souviens pas. T’y étais pas.

Mes héroïnes sont des gamines

Même dans mon écriture. L’autre jour, je lisais un thread d’Estelle Faye sur l’absence d’héroïne badass au-delà de la trentaine. Je réalise que, effectivement, mes héroïnes sont toujours plus ou moins dans la vingtaine. Parfois parce que ça m’arrange, je dois le confesser. Maja, Iris, Oceany sont la même personne : une jeune femme bien innocente qui découvre une réalité peu reluisante et qui va basculer en résistance. Ou à peu près. Dans mes prochains romans, y en a pas une qui devrait atteindre la trentaine. J’ai éventuellement un roman que je veux “drame bourgeois à l’heure où la France basculerait dans le fascisme” avec le personnage d’Hélène. Sorte de bourgeoise dépressive qui se révèlerait peu à peu une résistante vénère, un truc du genre. J’ai pas mal de bribes sur ce roman mais pas du tout la big picture donc pas sûre qu’il voit le jour. Mais je n’ai pas idée d’écrire une histoire d’une femme de 40 ans car… je ne suis pas certaine de savoir ce que c’est.

Ecrire un personnage
(c) Kelly Sikkema

Je suis loin de la quadra classique

Car je n’ai pas les items de la femme quadragénaire. Items attendus, je veux dire. Oui, je suis en couple et copropriétaire mais je n’ai pas d’enfants, je n’ai pas de poste à responsabilité qu’on pourrait attendre d’une femme de mon âge. Pire, quand j’ai eu mon poste à responsabilité dans mon dernier taf, je ne me suis pas sentie légitime. Je me disais “ah mais je suis sûre que les autres me trouvent trop jeune pour ce poste”. Ouais, j’étais la plus vieille des “head of” de mon équipe et j’étais même plus vieille que ma N+1 mais je bloque. Je bloque à environ 27 ans. Peut-être parce que mes 27 ans furent une année über chouette. Où la dernière année avant de perdre mes illusions sur le monde du travail, va savoir. Un sujet à voir avec ma psy du travail.

Faudrait peut-être que je vive ma vraie vie

Je ne chouine pas sur l’aspect noctambulle. Franchement, les soirées à piller mon compte en banque pour ingérer suffisamment d’alcool pour oublier que je m’ennuie, ça ne me manque pas du tout. Si je veux gigoter sur de la musique entraînante, je peux le faire chez moi. Avec, en bonus, la possibilité de totalement contrôler ma playlist. J’ai une terrasse à environ 2 mn à pied de chez moi si j’ai envie de siroter un cocktail. Ce que je ne fais jamais mais je pourrais. Le souci n’est pas que je suis pas 100% intégrée avec des jeunots non plus. Le souci, c’est que je ne suis pas en phase avec qui je suis. Ce qui, au niveau travail, me bloque, par exemple. Je suis trop jeune pour ce poste… Bah non, t’es même déjà un peu vieille pour ça. Je chouine sur une activité car je trouve les gens trop vieux alors que certains ont mon âge. Et de toute façon, j’ai envie de quoi ? Choper ou chanter ? Bon. 

Chanter dans une chorale
(c) David Beale

Me projeter avec justesse

J’ai pas mal de gros chantiers en ce moment. Priorité à la data, évidemment, mais ma psy du travail m’a donné quelques devoirs à faire. Calmer mes angoisses liées au passé, notamment le ressentiment, puis me projeter. Je dois faire un moodboard de ma future vie pro, par exemple. Et ce serait bien que dans cette projection, je me mette, moi. En tant que femme de 42 ans qui a le droit d’avoir d’autres priorités dans la vie que de se mettre une mine entre collègues. Je dis ça sans jugement, je l’ai fait. Par le passé. Quand j’avais 27 ans. Il y a quelques temps, j’avais écrit un article sur le “connais toi toi-même” que je n’ai évidemment pas appliqué. Je crois que je vais plutôt axer sur le “reconnais-toi”. Ca devrait m’aider quand je partirai en quête de mon prochain emploi. 

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