Retrouver l’insouciance
Ah, l’été. Cette saison bénie où je vis ma meilleure vie. Je vais au lac me baigner, nager avec les canards, les tortues et les poissons puis grignoter quelques mûres en chemin. Ah… oui, non, ça, c’était le récit de mes deux derniers étés. Mais cette année, je travaille donc le lac, on va y aller le soir après la journée de travail. S’il ne fait pas trop moche ou froid parce que pour le moment… Bref, j’ai un peu la nostalgie de mon été dernier où je me vautrais dans l’insouciance. Et je me dis “comment retrouver cet état même en étant salariée ?”
Le travail m’angoisse
Parce que le travail, c’est l’angoisse. J’ai déjà perdu le bénéfice des vacances, à peu près. Me reste le bronzage et la beauté de la Camargue au coeur. De l’angoisse souvent injustifiée même si, travailler en agence, c’est de la pure ingratitude. Genre sur mes deux clients actuels : un claque la porte fin juillet pour des raisons telles que “j’ai pas fait le travail de leur responsable acquisition”. Et mon deuxième a envoyé un mail mardi au directeur commercial pour annoncer qu’il souhaitait arrêter. Pour me dire jeudi que si, on continue. Ah tu m’étonnes que j’ai de la tension. Et comme je suis dans une boîte maltraitante, je suis un peu en hyper vigilance qui me fatigue.
Je voudrais vivre une vie douce
Ma psy du travail m’a dit de rester et elle a raison. J’en suis persuadée. Bon, déjà… grosse flemme de chercher du taf. Je suis assez blasée de passer des tas d’entretiens pour que les personnes me baladent, me rejettent pour des raisons un peu bizarres ou disparaissent, tout simplement. Me faire ghoster après plusieurs entretiens, même s’ils sont en visio, je ne comprends pas. Bref, je ne suis plus du tout en mode “la grande évasion”. Je suis en mode “je veux aller au lac, jouer à la console, écrire et faire du Powerpoint art”.
L’angoisse est mon quotidien
Des envies futiles ? Sans doute. Mais c’est ce que j’aime faire. Et c’est là qu’est ma voie de l’insouciance. Depuis très jeune, je suis préoccupée. Angoissée, oui. Par un peu tout. Dès que mon corps fait un truc bizarre, je me crains dans ce scénario type “elle va consulter le médecin pour un truc bénin, en fait, elle avait un cancer généralisé et est morte en quelques jours”. Mon petit vélo dans la tête, il est en mode ultra vénère. Vendredi, je dînais avec ma besta qui m’expliquait que son mec s’était fait enlever deux kystes bénins. “Non mais lui, dès que ça touche la santé, il imagine le pire”. Moi, je hochais la tête en mode “solidarité féminine, les hommes et la santé, ohlala”. Mais dans ma tête, c’était “mais moi, tu me dis que j’ai un kyste, je pleure ». Même si je sais que c’est bénin la plupart du temps.
J’imagine toujours le pire
Ma difficulté à être insouciante, elle est là. Je suis quelqu’un d’à la fois très optimiste et très pessimiste, selon à quelle étape de mon roller coaster émotionnel j’en suis. C’est essentiellement lié à mon cycle hormonal mais la météo joue sur mon humeur, aussi. Et mon niveau d’énergie disponible. Et trop de choses. Même si en surface, je reste sereine. Pourquoi je ne cherche pas de job actuellement ? Parce que je n’imagine que des refus. A Bordeaux, y a trop de gens qui veulent le job, je commence à être vieille. Et je pars en mode « je ne suis pas si douée que ça ». Bon, quand je suis au top de mon roller coaster, c’est plus “pfff, ils se prennent pour qui pour ne pas m’embaucher” mais c’est un autre sujet. Bref, je me fais du mouron, je rumine, je prends le moindre prétexte pour me flageller. Une réponse négative : “c’est parce que je suis nulle”. Alors que pour un job où on m’a dit non dès l’envoi du CV, j’ai découvert plus tard que le salaire était de 30-35 k€. Ah oui, effectivement, je suis au-dessus. On devrait tous l’être.
La chance, ce n’est pas pour moi
Sans doute que mon logiciel perso ne laisse pas de place à l’insouciance. Les belles histoires, c’est pour les autres, pas pour moi. Non que je sois à plaindre, en soi. Ma petite vie, j’ai signé pour avec enthousiasme. J’ai tout ce que je peux vouloir dans la vie. J’ai un jardin, des chats, un lac à quelques minutes de marche dans lequel je peux me baigner. Un amoureux aux petits oignons, évidemment. Je ne me prive de rien, ça fait des années que je n’ai plus besoin de me serrer la ceinture. Les galères, puisqu’il y en a parfois, sont relatives. Alors pourquoi je suis là “les bonnes choses, c’est pas pour moi”. Oh bah sans doute parce que je l’ai entendu toute mon enfance. Répété en boucle par ma mère à la moindre galère. A partir de là, l’équation est simple : je ne peux pas être insouciante puisqu’une nouvelle galère arrive au prochain virage.
Pourquoi ne pas savourer le présent ?
Il est temps d’arrêter avec ça. Evidemment qu’une prochaine galère va arriver, c’est la vie. Peut-être que je vais tomber en vélo et me casser un truc. Peut-être que je vais avoir une fuite. Enfin, la maison va avoir une fuite, pas moi. Peut-être que mon mec et/ou moi allons choper le covid, qu’on va avoir de la fièvre alors qu’il fera 35° dehors. Mais peut-être pas. Peut-être que je vais juste passer un chouette été. Qu’il ne sert à rien de se préoccuper sur ce qu’il pourrait se passer mais qu’il faut se focus sur ce qu’il est en train de se passer. Se dire que samedi, j’ai passé une pure bonne journée avec de l’écriture, de la balade, du shopping, une petite sangria, une bonne baignade au lac en jouant avec un ballon. Que vendredi soir, j’ai passé un bon moment avec ma besta.
Je fais quoi de mon angoisse ?
Bon, ok, le diagnostic est posé et so what ? C’est souvent le truc un peu vicieux de ces “connais-toi toi-même”. “C’est bon, madame, j’ai trouvé, je suis naturellement trop angoissée pour lâcher du lest et mettre plus d’insouciance dans ma vie. On fait quoi main’nan ? Allo ? Allo ?” Hé oui, je n’ai pas la réponse. Désolée si vous avez lu tout mon pavé en espérant une recette magique. Mais déjà, je ne crois pas en une recette magique universelle. Chacun ses stratégies de contournement de l’angoisse. J’avais vu ça lors de ma formation anti-stress, le côté “pour lutter contre le stress, vous pouvez faire ceci ou cela”. Ou, c’est le maître mot. Moi, par exemple, j’aime être manuelle dans les périodes de stress. Faut vraiment que je fasse un article sur les bagues en perles et les bracelets brésiliens qui m’ont sortie de déprimes post-rupture. Je glisse des perles, je fais des noeuds avec des fils de coton et ça me fait du bien. D’autres détesteraient ça, ça les tendrait plus qu’autre chose. A l’inverse, me mettre au running pour décompresser ne marchera pas chez moi. Parce que je ne sais pas courir donc je mourrais d’essoufflement au bout de dix minutes et je masserais mon point de côté en chouinant que je suis une grosse nulle. Yay.
Entre obligations et détente
Cependant, je crois de plus en plus que mon salut est dans le temps que je dois m’accorder pour faire des choses simples. Je suis un peu hypée par de l’origami en ce moment mais je ne le fais pas. Parce que “non, je dois finir ce truc avant de me déconcentrer”. Ou “je dois préparer le repas”. Parce que “je dois publier mon article de blog”. Parce que je suis adulte aussi et que, de temps en temps, faut voir à nettoyer la maison. Bref, la vie n’est pas que fun et amusement. Pour retrouver de l’insouciance, il faut admettre ça. Comme quand on était enfant : “fais d’abord tes devoirs et après, la vie t’appartiendra”. Sauf que moi, je ne faisais jamais mes devoirs parce que je m’en sortais sans. C’était le doux temps de l’insouciance !