Le purisme dans les exercices de développement personnel

Le purisme dans les exercices de développement personnel

Oh, ça fait longtemps que je n’avais pas parlé de développement personnel, moi. Sans doute parce que je me suis énormément éloignée de cette sphère pour de nombreuses raisons. En un, le côté gourou qui m’effraie pas mal. En deux, le flirt permanent avec les fake meds. Un big up à Thierry Casasnovas et Eric Gandon. Et en trois, le fait que je ne crois pas en la magie. Car oui, dans le développement personnel, il y a souvent ce côté “si tu fais ça, ta vie sera changée à jamais. A toi le bonheur”. Si bien que des gens se lancent là-dedans sans réfléchir, accomplissant bêtement des exercices sans en chercher le sens. Ce que j’appelle le purisme dans le développement personnel. Développons.

Le purisme dans le développement personnel
(c) Reinaldo Kevin

L’obsession de gommer les points noirs

Hier, j’ai annoncé sur Dystopie me lancer dans la semaine de la course au bonheur sur mes blogs. Ca va surtout être sur Citizen et Dystopie mais c’est un sujet qui me fascine depuis des années. Un fait : je suis moyennement heureuse dans ma vie. J’ai deux points noirs, grosso merdo. Le travail et mon envie de faire trop de choses. Si je ne peux pas vraiment régler la partie travail parce qu’il faut bien manger, j’ai beaucoup travaillé sur ma “productivité”. Mon obsession de ce que j’appelle le C.R.E.T. En une journée, caser la créativité, le repos, l’énergie et le travail. Environ impossible.Même si j’ai tenté le fameux Miracle morning, ennemi numéro 1 des nuits de 7 heures. Surtout que j’ai beau faire, je carbure le soir. Enfin, en vrai, je carbure le matin et le soir donc ma journée idéale, ce serait me lever à 6h, siester de 14h à 16h puis me coucher vers minuit ou une heure. Une nuit de 5h plus une sieste de 2h, j’ai mes 7h. Mais la société n’est pas super en phase avec ce rythme. Mon mec non plus, d’ailleurs.

J’ai essayé de me faire des routines

Bref, j’ai essayé de faire rentrer des carrés dans des ronds. Ou des ronds dans des carrés. Enfin, quand je dis “j’ai essayé”, je mens. J’essaie toujours. Pendant mon chômage, j’ai fait un programme. J’ai collé des horaires dans mon agenda sans jamais les respecter. Je prétendais pouvoir écrire, faire du powerpoint art, du sport, postuler et travailler (sur ma data pour pas perdre la main) en une journée. Ca n’est jamais arrivé. Parce que des fois j’ai la flemme. Parce que des fois, j’ai de la fatigue liée au froid, au temps, à mes règles… Relou. Je fais régulièrement des to-do list pour essayer de me motiver. Ca marche un temps et tout à coup, ça m’écrase. Ohlala, tout ce que je ne fais pas. Ah oui, moi, je suis la reine de voir ce que je ne fais pas vs ce que je fais. C’est parce que j’aime me flageller. Tiens, faudra que je fasse un article sur l’obsession du faire, ça peut être intéressant. 

Médite pas si ça te va pas

Tout ce pia-pia sur ma vie, ça s’applique à environ tout le monde. Traînassez dans n’importe quel groupe lié au développement personnel, tout est là. Le malheur est dans l’écart entre ce que l’on rêve de faire et ce que l’on fait vraiment. On veut tous être plus sportifs, plus artistiques, lancer notre petite entreprise, écrire un livre ou deux. Alors on va suivre des méthodes et c’est là que le purisme entre en jeu. Parlons donc du Miracle morning car je trouve que c’est le plus symptomatique de ça. Même si toutes les histoires de jeûnes sont pas mal non plus. En gros, le Miracle Morning, c’est pas juste se lever tôt pour faire des trucs. Nan. C’est se lever tôt pour faire ce que Hal Elrod, le créateur de cette méthode, te dit de faire. Les fameux SAVERS. En gros, t’as deux heures pour toi, cases-y du sport, de la méditation, de la lecture, de l’écriture, des pensées positives. Je suis un groupe sur le sujet et systématiquement, tu vois les petits nouveaux prenant cette méthode littéralement. Le purisme le plus total. “Alors oui, ok, mais moi, la méditation, je ne sais pas trop faire”. Mais Jocelyne, si la méditation ne te convient pas… ne la fais pas ?

Méditer seule
(c) Patrick Schneider

Il y a des outils utiles dans le développement personnel

Je ne rejette pas le développement personnel en bloc dans la mesure où je trouve que certaines activités sont intéressantes. Par exemple, là, je viens d’acheter une huile essentielle à l’orange douce, meilleur achat du monde. Je ne suis pas du tout calée en aromathérapie et je ne connais pas du tout les vertus supposées de cette huile. Juste que ça sent bon dans mon bureau et, ayant un odorat très développé, ça me rajoute des points de bonheur. Je veux me remettre au journal intime car je viens de traverser une période compliquée et c’est intéressant d’en garder trace. Histoire de ne pas réécrire l’histoire en arrondissant tellement les angles qu’on passe de “j’ai fuit un environnement toxique” à “j’ai fait un caprice”. La méditation, par contre… Moi, ce qui me fait du bien, c’est l’anti-méditation. En gros, j’aime laisser mon esprit galoper où il veut, je ne cherche pas à le canaliser. Je fais ça quand je marche, par exemple. Les pensées positives, c’est bien mignon mais on bascule très vite dans les lois de l’attraction et bof…

La magie n’existe pas

Ah bah tiens, les lois de l’attraction, très bon exemple pour le purisme du développement personnel qui est, en fait, source de malheur. Donc situation : y a un truc qui ne va pas dans votre vie et vous cherchez une solution un peu partout, y compris dans le développement personnel. Vous trouvez une méthode qui vous paraît pas trop con. Ou pas très implicante dans le cas des Lois de l’attraction puisqu’on est dans la pure magie. Forcément, en tant qu’élève débutant et motivé, vous allez vous appliquer à suivre à la lettre la méthode puisque c’est sûr, le bonheur est au bout du chemin. Le fameux purisme. Sauf que… ben la magie n’existe pas. Le miracle morning m’avait apporté deux ou trois trucs cools, notamment une petite pratique sportive et du retapage de mes manuscrits dans la douce odeur d’une huile essentielle. Mais j’aime paresser au lit, que voulez-vous. Les lois de l’attraction, c’est purement de la pensée magique. Si j’y crois, ça arrivera. Alors y a un fond de vérité. Je suis persuadée que quand on ne croit pas vraiment au succès d’un projet, on s’auto-sabote plus ou moins consciemment. Mais la pensée magique ne te protège pas de tout non plus. Il ne suffit pas de se répéter en boucle qu’on va passer une bonne journée pour que ce soit le cas. Même l’injonction à laisser couler les petites contrariétés pas si graves, suffit pas de la répéter pour qu’elle devienne vrai.

Le craquage de la frange

Et c’est là que pour moi, le purisme dans le développement personnel est source de malheur. D’un nouveau malheur. Tu as un point noir dans ta vie, tu veux le régler. Ok. Tu trouves une méthode que tu suis avec un purisme quasi stupide, ok. Et… ça ne marche pas. Oh crap ! Mais je fais tout bien, comment ça se fait que je gagne pas plus d’argent alors que j’ai ce vœu écrit sur un papier dans mon portefeuille (no joke) ? Oh, je suis une ratée du bonheur. J’échoue alors que j’essaie de bien faire. Ah mais oui mais le bonheur ne se décrète pas, en fait. Suffit pas de se dire que les petites contrariétés vont couler sur nous pour que ça devienne réel. Parce que tu vis dans un contexte. Oui, quand tout va bien dans ma vie, les petites contrariétés coulent sur moi comme une cascade en montagne au printemps. Et d’autres où cette petite contrariété va arriver en cerise sur le tas de caca et je vais fondre en larmes. Des larmes qui me paraîtront excessives quelques temps plus tard quand je serai apaisée. J’ai le souvenir d’Anne, ma besta du sud me raconter qu’un jour, elle avait pleuré car elle n’arrivait pas à coiffer sa frange correctement. C’est exactement ça, le craquage de la frange. Ce truc anodin qui n’aurait eu aucun impact dans un printemps ensoleillé après une bonne note à la fac ou un dossier rendu au travail. Mais qui, au coeur d’un hiver humide et pluvieux où il n’y a plus de lumière depuis des jours, devient dramatique.

Cacher sa frange derrière une feuille
(c) Allef Vinicius

Pense à ce qui te ferait du bien, indépendamment de la méthode

Le purisme dans le développement personnel est une source de malheur. Parce que la personne essaie de s’appliquer au mieux sans réfléchir à ce qui lui ferait vraiment du bien et surtout en ne prenant pas le vrai problème en charge. Dans mon cas, le vrai problème est que je ne suis pas réaliste dans mes attentes du quotidien. Mais que j’ai du mal à l’admettre car j’ai regardé trop de contenus développement personnel qui me disent que si je veux, je peux. Bon, ça va, y a plus insurmontable comme problème. Mais quid des personnes dépressives qui s’ignorent et écrivent des vœux pieux sur des bouts de papier en espérant que ça va solutionner leurs problèmes. Ceux qui se lèvent à 5h du matin et se lance dans de la méditation alors qu’ils n’aiment pas ça, ne le font pas bien et donc ont une nouvelle matière à flagellation ? Tout n’est pas à jeter dans le développement personnel. Vu comme ça brasse large… Mais la vraie question est “de quoi j’ai besoin, moi ?”. Et peut-être que la réponse ne dépend pas forcément de vous mais de l’aide qu’on pourra vous apporter. 

A demain sur Citizen pour parler du bonheur comme moyen des gouvernants pour faire taire la contestation (à peu près).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *