Douceur de routine

Douceur de routine

Bonjour, cet article est celui d’une personne en charentaise. Métaphoriquement parlant, je ne possède pas de charentaises. Mais je vais clamer une nouvelle fois mon identité de meuf pantoufle. Depuis un mois et demie, je suis délivrée de la ma dernière angoisse du moment : vais-je réussir à trouver un job ? Parce que hop, c’est fait et j’ai même fêté mon mésiversaire jeudi. Et bu trop de Spritz vendredi avec mon collègue et mon N+1, yeah… Révélation : j’ai passé l’âge de (trop) boire. Et de toute façon, ma vie n’est plus celle d’une fêtarde toujours entre deux mojitos et deux mecs.  Non, aujourd’hui, je n’ai qu’une aspiration : la routine.

Le bonheur de la routine
(c) Kelly Sikkema

Avant, je détestais la routine

La routine fut longtemps pour moi une menace terrible. J’ai grandi avec Starmania et moi non plus, j’avais pas envie d’être un robot métro-boulot-dodo. Je peux même dire que j’ai détesté les périodes de ma vie où j’étais littéralement cantonnée à ça. J’ai une envie de vivre, d’expérimenter, toujours très forte. Je courais après la surprise, l’inattendu. J’aimais raconter ma vie comme des aventures extraordinaires. Genre

“T’as fait quoi ce week-end ?

– De la luge à Montréal et toi ?”

J’aimais nager avec les raies manta, danser un soir de Nouvel An avec les dauphins… J’ai été figurante sur Plus Belle la vie. Bon ok, dans une scène de foule et en plus, on était super loin et je ne connaissais pas les acteurs. Je n’ai aucune idée de ce que je foutais là. Mais on me proposait de vivre des trucs et je disais toujours oui. J’ai été photographe sur tapis rouge aussi. Là aussi par hasard et je détonais complètement avec mon petit Olympus vs les énormes reflex des vrais photographes. Et puis il y avait les nuits folles avec ces jolis garçons. 

Passion infusion

Ouais, j’ai vécu des petites aventures. Et puis la vie se recentre un peu. Déjà, je n’ai plus 20 ans ni même 30. J’ai passé mon samedi à végéter pour me remettre de mes quelques Spritz. Ah bah elle a pris un coup de vieux, l’aventurière, dis donc. Oui mais est-ce que je regrette ma période semi-alcoolique ? Pas du tout. Il est vrai que mes soirées ressemblent plus à mater un truc sur Netflix en sirotant une infusion. Je blague pas, j’ai une super infusion basilic sacré-gingembre, un délice. A 22h30, on coupe tout, une bonne douche avec notre ambiance hammam, une petite lecture et au dodo ! Bon, le 22h30, on le tient pas toujours mais on essaie. Bref, mes aventures, elles passent désormais dans mes écrits où des personnages se retrouvent un peu malgré eux pris dans des histoires qui les dépassent. Moi, plus rien ne me dépasse. 

La routine, c'est l'ennui
(c) Joshua Rawson-Harris

Un bon petit équilibre

Et cette vie ne me rend pas malheureuse. La routine, ça a l’air d’un truc atroce quand on en parle, le fameux métro-boulot-dodo mais ce n’est pas ça. Oui, ma vie est pas mal squattée par mon travail. Enfin pour le moment, pas trop du fait que j’ai pas grand chose à faire. Du coup, l’équilibre vie privée – vie professionnelle est assez facile à trouver. En vrai, la routine, je la hais quand mon travail absorbe tout, quand j’entre en phase asthme mental. Mais quand j’ai une petite vie simple comme actuellement, c’est pas si mal. Un peu de travail, un peu de sport, un peu de cuisine, pas mal de fictions et de création. C’est sûr qu’à raconter, ce n’est pas le plus passionnant. Mais c’est reposant.

Profiter de chez soi

Et le repos, j’aspire vraiment à ça. Depuis quelques années, mes parents ne sont plus guère volontaires pour parcourir le monde. Ils se font parfois quelques virées mais souvent, ma mère me dit “oh bah on est bien à la maison, tu sais”. Dans mes années parisiennes, j’avais du mal à capter. Ok, on est bien chez soi mais y a tant à voir dans le monde. Si je reste attachée à cette envie “d’aller voir”, la structure de mes vacances change. Avant, je partais le plus tôt possible et rentrais le plus tard. Du samedi au samedi, gardant le dimanche pour la lessive et le seum. A peu près. Une année, j’étais même rentrée le lundi matin pour embaucher à 14h. J’étais arrivée au boulot avec ma valise, bronzée avec les cheveux d’une blondeur presque blanche. Je me souviens précisément de mon arrivée dans l’open space, j’avais l’impression d’exhaler encore l’iode alors que les autres avaient entamé leur semaine de travail depuis plusieurs heures. Je m’étais réveillée sur un bateau, pris un petit déjeuner à Toulon et me voici. Ne pas perdre une minute. Aujourd’hui, mes vacances, c’est quelques jours ailleurs mais surtout quelques jours à la maison. J’ai un jardin, j’ai un lac à cinq minutes à pied. Un week-end pour déconnecter ? Vas-y, on prend le train pour Arcachon. 50 mn de TER, la folie !

La plage des Arbousiers à Arcachon

Le repos de la guerrière

Et je vais vous dire : la routine, en vrai, c’est le repos de la guerrière. Parce que déjà, vivre des aventures, c’est bien mais pas toujours épanouissant. Les nuits avec les jolis garçons, pour quelques unes dignes de romans (un peu à l’eau de rose), d’autres n’étaient qu’une perte de temps et un attentat contre l’estime de soi. J’ai lu L’amour sous algorithme de Judith Duportail et elle raconte parfois quelques déconvenues et c’est ça aussi, la réalité du dating. Le mec indélicat juste là pour tirer son coup et régler ses comptes avec les femmes, au passage. Et puis il y a toutes ces dates “grises”. Ni négatives, ni positives. T’as pas passé un mauvais moment ni vraiment un bon non plus. Il y avait aussi ces soirées en groupe où, soudain, tu te trouvais débarquée du train de la soirée sans avoir compris le pourquoi du comment et tu avais juste hâte de rentrer chez toi retrouver ton chat, ton plaid, ton lit et ton bouquin. 

Goûter la vie

Je suis un peu fatiguée de courir et j’ai envie de juste me reposer. Et la routine est là pour ça. Des aventures, je vais en revivre, bien sûr. En ce moment, j’ai envie de faire des expéditions kayak avec mon copain. J’essaie d’être régulière dans ma pratique vélo pour travailler mon endurance et qu’on s’offre de jolies balades, de plus en plus loin. J’ai même envie de faire un tour de bassin en vélo. Sur plusieurs jours parce que le vélo doit être contemplatif, je suis pas Alaphillipe, moi. Je suis plus en mood Yves Montand. Mon nouveau chef passe ses week-ends à faire du parapente et à force qu’il m’en parle, ça va commencer à me gratter sévère. Y a tous ces périples que j’ai en tête. Toutes ces régions de France à portée de train. Oui, ne plus (trop) prendre l’avion ne signifie pas ne plus voyager.

Voyage en train

On arrête de courir

Et puis il y a d’autres aventures, après tout. Apprendre des trucs, découvrir un nouvel artiste, une nouvelle série. Se renseigner, tester de nouveaux trucs. Et accepter la routine. Que la seule surprise de mes journées, c’est le casting des chats qui va défiler dans mon jardin. Ou d’avoir entendu une nouvelle chanson que j’adore et que je vais écouter en boucle pendant des jours entiers. Ou d’avoir une nouvelle idée de roman… ah non, ça, c’est ma routine, justement. J’étais un peu inquiète, en trouvant mon nouveau boulot, à la perspective de ne plus courir après quelque chose. Que ce boulot là, j’allais le garder longteeeeemps parce que le marché bordelais ne m’offre pas tant d’opportunités que ça, surtout à ce salaire. Mais finalement, arrêter de courir après la prochaine expérience, la prochaine étape… C’est pas mal, non ?

Une vie tisane-vélo-chat

Bref, je savoure ma routine. J’aime ma tisane du soir, j’apprends à apprécier nos petites balades vélo-marche de fin de journée. Dès que j’ai pris le pli du rythme présentiel de mon nouveau taf, je vais voir si je commence une petite activité extraprofessionnelle ou si j’attends l’an prochain. Et oui, j’ai déjà pensé au kayak mais le seul cours sur Bordeaux est gavé loin de chez moi et à 9h30 le samedi matin. Comment dire que je vais jamais y aller ?  Je crois que mon “malheur” et ma tendance au burn-out se situait dans mes envies d’échapper à ma routine à tout prix. Au prix de mon sommeil, de ma santé financière et, in fine, de ma santé mentale. L’idée qu’un grand destin m’attendait. Je dis pas ça de façon prétentieuse. Je dis ça dans l’idée que j’ai passé mes jeunes années d’adulte à entendre que le pire truc qui puisse arriver, c’était de vivre en banlieue dans un pavillon calqué sur les voisins avec un serre-tête et un labrador. Que c’était la vie des gens médiocres et sans ambition. Mais en vrai, j’en ai pas, moi, de l’ambition. J’acquiers les codes toujours trop tard et je fais zéro effort pour jouer le jeu, de toute façon. Alors certes, j’ai pas le serre-tête, le pavillon mais j’ai une petite vie peinarde avec mon mec, mes chats, mes tomates et mes citronniers. Et le truc qui me fait lever le matin, c’est de faire le tour de toute ma petite végétation pour voir qui a poussé, si j’ai un petit nouveau dans mes pots…

Mes petits citronniers
Petit dernier découvert hier

Et en vrai, c’est coooooool. Bon, on en reparle dans six mois mais pour le moment, ma routine, je la savoure.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *