Mon injonction bourreau : “fais plaisir”

Mon injonction bourreau : “fais plaisir”

Et me revoici, fraîche, reposée et surtout bronzée après quelques jours de vacances à Malte. Enfin, fraîche, tout est relatif vu que la météo annonce un merveilleux 41° cet après-midi. J’ai un peu envie de pleurer… Mais je ne suis pas là pour causer climat et météo, je suis là pour vous parler de ma grande obsession : trouver un chouette travail. Et pour procéder au mieux, j’ai pas lésiné sur les moyens. En plus de ma super coach emploi dans le cadre de mon bilan de compétences, j’ai entrepris une thérapie. Et oui, mon pétage de plomb d’avril n’est pas né du néant, c’est l’aboutissement d’années à patauger en haute toxicité. Et s’il est sans doute vrai que je n’ai pas toujours eu de chance, on va travailler pour que ça n’arrive plus. Enfin, on va essayer. Et cette première séance chez le psy a soulevé un point majeur : je suis beaucoup trop impliquée dans le “fais plaisir”.

Fais plaisir
(c) Katherine Hanlon

Moi, je vis pour faire plaisir

Je vous avais déjà parlé du “fais plaisir” et des drivers il y a quelques semaines. J’avais identifié le “fais plaisir” comme boulet à ma cheville mais je n’avais pas compris l’ampleur du truc. Je pensais naïvement que le “Fais plaisir” concernait mes parents mais non, je fais ça partout, tout le temps. Un peu dans ma vie perso aussi mais ce n’est pas tant le sujet du jour donc je ne vais pas m’y arrêter. Mais alors que je racontais ma vie pro à cette super psy, elle me répondait souvent “ah, oui, vous êtes dans le “fais plaisir”. Fais plaisir qui m’aura littéralement coûté une dizaine de milliers d’euros en cumulé, je pense. Quel génie…

Compenser ma nullité par des services

Car je veux être une employée sympa et fiable. J’ai longtemps pensé que ma très grande difficulté à dire non était lié à une sorte de timidité… Ou plutôt à mon mastoc syndrome de l’imposteur. Si je me rends utile au max, ça devrait compenser mon incompétence, voyez. J’ai d’ailleurs lu un petit article très léger de Néon qui parle de ce collègue qui fait tout sauf son taf pour masquer son incompétence. Exactement ce que je racontais. Sauf que moi, je ne m’amuse pas à remplir la machine à café, non. Je rends service sur des trucs chiants et potentiellement chronophages. J’aide sur les reportings, sur le lancements de campagne, je prends du temps pour expliquer, faire des tutos… Ce qui est fort appréciable sur le coup mais potentiellement à double tranchant. Dans mon ancien taf, “donner un coup de main sur une tâche” semblait me transformer en responsable de la dite tâche. Quant aux tutos, c’est une bonne idée…  Dommage que les principaux concernés ne les suivent pas. Après tout, Nina Bonne Poire est là pour faire la tâche, qu’est-ce qu’on s’en fout ? Et tout ça vient du mécanisme “fais plaisir”.

S'oublier pour répondre au besoin de faire plaisir
(c) Lina Trochez

Je serai là pour toi

J’aime à penser que je suis une personne sur qui on peut compter. Même quand ça me fait turbo-chier. Une amie me demande de la conduire à un entretien en pleine zone industrielle toulousaine aux heures de pointe ? Comment refuser alors même que j’ai une peur limite panique des bouchons et potentiels accrochages. Un coup de main pour un déménagement ? Oui, pas de soucis, les amis sont là pour ça. Venir à l’agence un jour où ça ne m’arrange pas du tout car c’est l’anniversaire de Machin ou le dernier jour de Bidule et c’est important quand même ? Compte sur moi. Des tas de gestes qu’on ne me rend pas forcément. Alors je ne rends pas service pour qu’on me le rende, je ne tiens pas de cahier comptable de la gentillesse mais… Ca fait parfois mal au cul. Et donc, au boulot, c’est pareil. Faut se serrer les coudes ! Et être positif, surtout. En voilà, un pan intéressant du “fais plaisir”. Quand je remonte un problème, j’édulcore toujours d’un “mais ça va le faire”, “ça ira mieux après cette échéance”. Alors pour le deuxième, j’y crois vraiment. N’oublions pas que mon optimisme est mon pire défaut. Cependant, quand l’échéance arrive et que je suis pas dans les temps, je me sacrifie. Encore et encore. Bye mes soirées, bye mes week-ends, je bosse. Ce qui est stupide. On ne gagne rien à être martyre du travail. Surtout que si ton taf n’est pas top, on va pas prendre en compte que tu as bossé plus que de raison, hein. Mais je veux faire plaisir. Que tout le monde se félicite de ce travail fait et qu’on fasse comme si tout allait bien. 

Je suis soi-niante

Y a quelques années, une amie m’avait dit, à propos d’une relation amoureuse plus que bancale, “attention, tu te places dans le rôle de soignante et dans soignante, il y a “soi-niante”.” Et on est toujours dans le même processus. Je me mets dans la merde pour faciliter la vie de tout le monde. Je m’auto-attribues le rôle de baume et, curieusement, les gens en profitent. Pas forcément consciemment, attention. Je ne dis pas que tout le monde est habité de mauvaises intentions. Que ce sont tous des génies de la manipulation qui chopent immédiatement tes failles pour les exploiter. Mais quand tu rends service une fois, deux fois, trois fois… y a pas loin pour que ça devienne une habitude. Mais moi, j’ai ce driver “fais plaisir” qui me fait prendre des mauvaises décisions, que me fait me mettre systématiquement dans la mouise. Un peu malgré moi. Beaucoup malgré moi. Vous savez la première chose que j’ai répondu quand un manager m’avait demandé de me mettre en arrêt maladie pour faire sauter Pierre le pervers ? “Là, je peux pas, j’ai ceci ou cela à faire”. Quand j’ai chopé le Covid, mon premier réflexe a été de travailler un peu “pour pas mettre les gens dans la merde”. Alors que j’étais fiévreuse, claquée et peu prompte à avoir la moindre réflexion pertinente.

Travailler quand on est malade
(c) Kemmy Sikkema

Me faire plaisir à moi

Bref, j’ai mis le doigt sur un élément essentiel pour essayer de mieux gérer mon travail. Je ne dis pas qu’il faut ne bosser que pour soi, ne plus jamais rendre service. Mais il faut un peu plus réfléchir au gain et à la perte que cela représente. Et surtout, surtout, il serait temps que je me questionne : qu’est-ce qui me fait vraiment plaisir, à moi ? Et ça tombe bien, c’est précisément tout le travail que je réalise avec mon bilan de compétences !

 

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