Ce que la procrastination dit de nous

Ce que la procrastination dit de nous

On va faire de la divination dans nos flemmes. Nous sommes en décembre, mois que je n’apprécie pas vraiment. D’abord il fait nuit tout le temps. Non mais je pars de chez moi à 8h, il fait nuit, je rentre à 19h, il fait nuit. Et vu la météo, même quand il fait jour, il fait nuit. J’ai atteint le point où j’ai le réflexe d’allumer les lumières de mon vélo y compris quand j’en fais en plein jour. Tu rajoutes à ça la course que ce mois représente pour acheter les cadeaux de Noël à temps, tout boucler avant des “vacances”. Soit quelques jours où tu cours dans tous les sens pour voir trop de monde en mangeant beaucoup trop de nourriture. Sans oublier que, pour ma part, 100% de mes grands-parents qui étaient encore en vie à ma naissance sont morts en décembre. Tout ça fait qu’en ce moment, je m’abîme dans la plus grande procrastination. J’ai des excuses, oui. Mais est-ce que ça ne cache pas autre chose ?

Les délices de la procrastination
(c) Chase Yi

Des soirées à glander sous le canapé

Un soir lambda de semaine. Après être rentrée en vélo du boulot, petit dîner en amoureux puis je vais m’installer sur le canapé. Quand je dis installer, comprenez “me vautrer comme une patate sur le côté liseuse du canap”. Mais est-ce que ça se vautre vraiment, une patate ? En temps normal, la soirée est occupée à, potentiellement, plusieurs choses. De l’écriture, de la mise en ligne d’articles de blog, parfois même du loisir créatif. Mais en ce moment, il se produit toujours le même phénomène. A peine étalée que mon chat vient sur moi et ça devient difficile de faire quoi que ce soit. Et de toute façon, je ne lâche pas mon tel sur lequel je joue à un mini jeu. Pas Candy crush mais une sorte de Tetris. Puis c’est l’heure de me coucher et ma soirée n’aura servi à rien à part regarder quelques vidéos Youtube ou ma série coréenne sur le couple dont je vous parlerai quand je l’aurai finie. 

Pas une perte sèche de temps…

En soi, la procrastination n’est pas tant du temps perdu puisqu’elle permet de canaliser mon corps tandis que je pense à autre chose. La suite de mon roman qui n’avance pas vu que je n’écris pas. Ca peut être ressasser un truc de la journée, imaginer des dialogues entre des personnes de la vraie vie et moi qui n’auront sans doute jamais lieu. Ah, je vais lui dire ses quatre vérités à Bobby parce que là, les bornes des limites ont été dépassées. Je lui dirais ça, puis ça, puis ça et… Et quand je vois Bobby, je ne dis rien du tout parce que je n’aime pas le conflit ou que je ne trouve pas l’occasion. Ou je le dis de façon tellement édulcorée que bon… Mais ce n’est pas tout à fait du temps perdu puisque parfois, je trouve qu’un de ces dialogues aurait sa place dans un roman et je les note quelque part. Bon, romans qui n’existeront sans doute jamais mais n’oublions pas que je vis toute une autre vie dans ma tête. 

Rêvasser
(c) Jarle Johansson

J’ai pas d’énergie créative

Mais force est de constater qu’en ce moment, je ne produis pas grand chose. Mes blogs traînassent, j’ai abandonné Instagram, y compris mon compte Playmo. Je n’avance pas sur mon Powerpoint Art. Je n’ai pas non plus produit d’infographies sur mon LinkedIn. Ici, on ne va pas se cacher derrière l’excuse du temps donc quoi ? Et bien… j’ai juste pas beaucoup d’énergie. Je ne me sens pas dans une phase créative. Il faut dire qu’il s’en est passé des choses, ces dernières semaines. Je suis en pleine dissonance cognitive, dirons-nous. Et c’est encore du côté du travail que ça couine un peu. Pour la faire courte : j’ai été embauchée pour faire de l’acquisition de lead pour ma boîte. La lead gen BtoB, ça me plaît bien, surtout qu’il faut faire pas mal d’analyse. Donc vraiment, j’ai droit à deux mois de Lune de miel sans nuage. Puis patatras : ma boîte vient d’être rachetée. Je dois donc déjà faire le deuil de l’histoire qui devait être mienne au moment de mon embauche. Et je suis déjà affectée à de nouvelles missions dont… du community management. 

Je déteste le community management

Pour ceux qui m’ont découverte un peu récemment, rappel des faits : j’ai fait du community management pendant dix ans et j’ai détesté ça. Vraiment, pendant des années, j’ai couru après une épiphanie en mode “ah, je suis malheureuse, qu’aimerais-je donc faire de ma vie ?”. La question était mal posée car la réponse était évidente : écrire. J’adore écrire, c’est mon hobby préféré. Sauf que je ne suis pas très optimiste quant à la possibilité de me faire éditer pour de vrai et de pouvoir en vivre. Tiens, on en reparlera de ça, j’ai des trucs à dire dessus. La question aurait dû être “qu’est-ce que je ne veux pas faire de ma vie” et la réponse est “utiliser mon hobby préféré pour pondre des trucs archi nuls”. Je déteste le CM parce que je déteste écrire des statuts emphatiques, inutilement ampoulés. Avec, en plus, cette sensation d’être le gros boulet de service qui s’incruste dans toutes les conversations. Genre “hé, mais c’est la journée de (truc aléatoire) ! Saviez que chez notre marque, on adore le truc aléatoire alors que ça n’a rien à voir avec nous mais on nous a dit qu’il fallait faire du trend hack ? Like !”. Tuez-moi, pitié.

Un néon like
(c) Yana Nikulina

Procrastiner plutôt que d’écrire des statuts

Sauf que cette mission de CM me pourrit la vie. Littéralement. Déjà, je déteste ça, je n’arrive pas à en prendre mon parti. Je pourrais, hein. Chaque post doit être écrit en français et en anglais. Je pourrais me dire “trop bien, je perds pas mon anglais, je le pratique”. Sauf que non. Parce que j’en ai globalement rien à foutre et que je développe une résistance incroyable à ce sujet. L’anglais ? Un coup de moulinette sur DeepL, Linguee et translate pour bâtir un truc qui ne sonne pas trop traduction automatique et voilà. Le rapport à la procrastination ? Je ne veux tellement pas bosser là-dessus qu’au moment de me mettre sur le sujet, je perds du temps. J’arrête de faire quoi que ce soit.  Je vais glander sur mes 10 000 réseaux sociaux où rien ne m’intéresse vraiment. Je vais écrire trois lignes de mon roman, deux lignes de mon journal. Et comme ça pendant trente ou quarante minutes. La procrastination au sens propre du terme.

Une stratégie d’évitement ?

J’essaie souvent de trouver des stratégies pour éviter la procrastination. Non parce qu’à la limite, que je passe ma soirée à jouer à Tetris sur le canapé avec mon chat ronron dessus, c’est pas grave. Le roman que j’écris ne quittera sans doute jamais mon pc, personne ne note que je n’ai pas publié d’articles depuis trois jours. Et rien de tout ça ne me ramène de l’argent. Je risque d’être frustrée, certes, mais ça, c’est entre moi et moi que ça se joue. Pour le boulot, c’est un peu plus ennuyeux. J’ai certes validé ma période d’essai et je veux vraiment me débarrasser de cette mission de CM. Ce que j’ai formulé, d’ailleurs, je deviens adulte. Formulé à ma cheffe, hein, pas formulé dans ma tête en jouant à Tetris. Mais j’ai pas envie de pourrir ma réput’ par pure flemme. D’autant qu’au vu de mon CV des dernières années, faudrait que j’arrête de changer de job tous les six mois. 

Angoisses d’anticipation et manque de soleil

Bref ma procrastination actuelle me dit clairement deux choses. De un, je ne suis pas faite pour vivre sans lumière du jour. Mais ça, on le savait déjà. De deux, je déteste vraiment le community management. Ce point est néanmoins assez cool car il rétro-éclaire certains moments de ma vie où je n’étais pas très heureuse et maintenant, je sais précisément pourquoi. Je veux dire, je savais que je n’aimais pas mon job mais je ne pensais pas que c’était à ce point épidermique. Et de trois, je n’ai pas du tout réglé mes angoisses d’anticipation. Car mon histoire de rachat, là, si ça a été annoncé la semaine dernière… J’ai commencé ma presta CM y a un mois donc j’étais un peu au courant du truc. Et ça me stressait de fou, j’avais peur des réactions des uns et des autres. Maintenant l’annonce faite, j’ai peur qu’on m’empêche de faire le job pour lequel j’étais venue. Et vu qu’on m’a déjà sollicité sur un avant-vente pour du marketing digital, je ne délire pas tout à fait non plus. 

Grimace
(c)Maria Lysenko

Brouhaha mental

Or ces angoisses d’anticipation créent un bruit mental de fou qui me plongent dans la procrastination. Je n’écris plus parce que je suis fatiguée, certes. Un phénomène peu remarquable en décembre. Mais y a toutes ces questions qui se percutent dans ma tête, cette crainte que mon job de rêve n’ait été qu’une illusion. Un peu de colère là-dessus aussi sur ce manque de chance perpétuel. Je veux dire quand j’ai passé mon entretien en juillet et que j’ai embauché en septembre, il n’y avait pas encore de proposition de rachat ni rien. Je n’ai pas vu les red flags car il n’y en avait tout simplement pas. J’ai un peu l’impression qu’on m’a volé ce qui aurait dû être mon histoire parfaite même si… Bon, en creusant un peu, j’ai découvert que tout n’était pas rose non plus. Mais dans la configuration de base, je n’aurais jamais dû faire du CM. Bref, je dois gérer mes angoisses d’anticipation, ma colère, mon imagination qui n’arrête pas de me rejouer les premières semaines idylliques dans ce job. Sans doute en rajoutant des paillettes car je suis très douée pour réécrire le passé en plus joli. Dans tout ça… à quel moment suis-je censée écrire ? Ecrire correctement, même, je dirais ? Tout ce brouhaha, ça m’empêche d’avoir de la finesse dans mes mots. Et on se retrouve avec des personnages déprimés qui tournent en rond parce que je sais pas quoi leur faire faire.

Au pire, repose-toi

Moralité ? Aucune. Peut-être devrais-je partir en quête d’une façon de faire taire le brouhaha mental. Ou alors sur le plan pro, trouver une façon de faire ma mission sans que ça nuise au reste de mon travail. Et sur le plan perso, profiter de cette période pour me reposer puisqu’il fait nuit et froid, qu’il pleut depuis toujours au point que j’ai désormais deux lacs à côté de chez moi. Tiens, je pourrais en profiter pour aller faire quelques photos Playmo là-bas et retrouver le mojo créatif… La vie trouve toujours un chemin.  

 

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