Les gens inspirants
Vendredi, j’ai été surprise. En bien. Nous avons quitté Paris fin décembre avec une frustration : fin 2019, nous avions décidé de faire plus de spectacles. Ca avait commencé par des concerts, de Worakls à Bregovic. Puis on avait réservé pour 2020 pas mal de trucs : Marina Rollman début mars, les Franglaises fin mars, Pierre-Emmanuel Barré en avril. Et ma représentation de Starmania en juin. Et bien, à part Marina Rollman, tous les autres ont été annulés. Sacré Covid. Arrivés sur Bordeaux, on guette un peu les spectacles et on voit passer Florence Mendez. Ah oui, elle est rigolote, allons-y. Et ce fut une belle claque. Florence, direct dans mon top 3 des gens inspirants.
Je suis médiatiquement larguée
Remettons un peu de contexte. N’ayant plus la télé, je suis assez larguée niveau “famous people”. Je n’écoute pas vraiment la radio non plus donc autant vous dire que quand mes camarades de comédie musicale s’extasient sur Clara Luciani ou Juliette Harmanet, je souris poliment en situant juste qu’il y en a une avec une frange et l’autre… C’est peut-être très bien ce qu’elles font, j’en sais rien. Ce n’est jamais arrivé jusqu’à moi. Il doit en aller ainsi de pas mal de chanteurs, acteurs, humoristes… Je n’en tire aucune fierté, c’est juste comme ça. Par contre, je consomme beaucoup de Youtube et que trouve-t-on sur Youtube ? Les capsules humoristiques de France Inter. Vous aurez noté que les spectacles prévus avaient ce petit goût de radio publique. C’est pas compliqué : le dernier spectacle avant le Covid, c’était Marina Rollman, le dernier spectacle parisien vu, c’était Fanny Ruwet.
Tiens, elle, elle est marrante
Et nous voici sur Florence Mendez que je trouve assez rigolote. Même si elle peut être très émouvante parfois comme cette capsule où elle lit une lettre écrite à son fils pour lui parler de la mort d’un de ses camarades de classe. C’était pas ma préférée du lot, elle devait arriver en troisième derrière Fanny Ruwet et Marina Rollman, donc. Enfin, j’arrête pas de parler de top mais en vrai, je n’en ai pas. J’aime un peu plus Fanny Ruwet parce que j’aime l’accent belge et qu’elle aime la soupe, on se retrouve. Donc voilà, humour France Inter, le seul truc que je suis à peu près. Je ne suis pas très au fait de la carrière de Florence. Je connais ces chroniques et ce sketch joué à Montreux. Mais elle passe à Bordeaux et on a des envies de vie culturelle, alors… Alors du coup, j’étais pas prête à me prendre une claque.
Entre rire et larmes
Déjà, j’ai beaucoup ri. Aux éclats. Et vraiment, en ce moment, j’ai besoin de rire. Ca me sauve de mon perpétuel burn-out. Plusieurs fois, aussi, je me suis dit “j’aime bien son jeu, son rythme, ses déplacements. Je vais m’en inspirer”. M’en inspirer pour quoi, allez-vous me dire ? Je ne sais pas trop vu que cette année, à la comédie musicale, je ne joue pas du tout un personnage drôle. Mais j’ai vraiment eu cette pensée. Et puis tout à coup, le spectacle a pris un ton plus émouvant, plus grave. La fin pèse un peu sur le coeur et quand Florence apparaît en larmes pour saluer, émue par les applaudissements chaleureux. Ca a fait fondre mon coeur. Je suis incapable de ne pas être touchée par les gens qui pleurent. Raison principale pour laquelle j’ai pas d’enfants, j’en aurais fait des connards sans respect et sans limite.
Je veux faire un one-woman show
Je suis sortie de la salle un peu tourneboulée. Mon mec aussi. On est restés assez silencieux pendant que l’on mangeait notre galette post-spectacle. Et ça a commencé à fourmiller. J’ai envie d’écrire un one woman show. Sur le monde du travail, ouais. Après tant, ça fait bientôt que 15 ans que chaque jour, je me lève en me disant que j’ai pas envie, que ça sert à rien et que j’aime pas mon job. Autant en faire quelque chose. Ouais, je vais l’écrire ce spectacle. Parce que Florence Mendez fait partie des gens inspirants et qu’elle m’a insufflé de l’énergie. De l’énergie créatrice. Alors que son spectacle ne tourne pas du tout autour du monde du travail mais j’ai été touchée par une forme de grâce.
Raconter mes turpitudes professionnelles ? Mais oui !
Alors entendons-nous bien. Il y a 99,9% de chance que ce spectacle n’existe que sur Google Doc et peut-être même pas en entier. En 2021, j’ai trépigné d’impatience à l’idée d’écrire l’histoire de mon précédent job tellement c’était toxique, j’ai même pas fini le premier article. Peut-être parce que j’ai quitté un navire au bois pourri en train de prendre l’eau pour un autre navire au bois pourri en train de prendre l’eau. De façon différente, certes. Les gens sont vachement plus sympa et la vie à Bordeaux édulcore le burn-out. Mais en même temps, j’ai envie de croire que ces 15 ans de soupirs et de turpitudes, de CV mis à jour en espérant que la prochaine fois soit la bonne ne seront pas vains. Même si là, j’y crois plus à la “prochaine fois”. Je crois en chercher comment me faire de la tune sans nuire aux plus précaires ou à la solidarité nationale pour pouvoir prendre ma retraite au plus vite. Rentabiliser la lose, ça a toujours été mon état d’esprit.
Prendre toute source d’énergie
Mais en vrai, on s’en fout que ce spectacle n’existe jamais. Déjà parce que j’ai aucune idée de comment on joue un spectacle, faudrait que je prenne des cours de théâtre, tout ça. Bref, cela tient sans doute du doux rêve mais… Ce qui compte, c’est le sentiment que j’ai ressenti hier. Quand j’ai vu ce spectacle et l’énergie qu’il m’a apportée. Cet élan, cette envie de faire. Cette sensation que j’en ai encore sous la pédale et que c’est cool. Alors merci les gens inspirants qui donnent envie de faire et surtout merci à Florence Mendez pour tout son travail. Allez la voir, c’est vraiment drôle et touchant. Et j’espère que, comme moi, vous serez touché par le feu sacré de l’inspiration. Parce que ça fait juste du bien.