Le projet “nouvelle moi” ou la grande fuite en avant
Vous l’aurez noté, en ce moment, je démonte pas mal les régimes et le développement personnel. Parce que pour moi, ce sont les ingrédients d’un même mal : le projet “nouveau moi” ou “nouvelle moi”. Cette fameuse “meilleure version de moi-même” qu’on vous vend dans des dizaines de livres. Cette future moi qu’on vénère alors qu’elle n’existera jamais. Et que même si on parvenait à atteindre nos objectifs, on les repousserait toujours. Parce que tout ça, mes amis, c’est juste une formidable fuite en avant.
J’ai la passion du projet
Je suis une meuf à projets. Non, pas comme le mec qui crie. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai des marottes. Et j’adore ça. Il y a mes romans que j’écris, mes envies de DIY. Des petites choses sans ambitions comme des bijoux en perles et autres perles hama qui me détendent. Mes désirs de paper art même si là, en ce moment, j’ai plus envie de développer mes talents en powerpoint art. Au pire, je me plante, ça fait pas des kilos de papier ruinés pour rien. Dès qu’une envie me vient, je compulse. Je compulse à mort. Laissez-moi vous parler du projet mort-né… le projet vitrines.
Future artiste de diorama
Tout commence en décembre 2014 dans un petit village près de ma ville natale. Bon, en vrai, j’ai un doute sur la date mais faisons semblant. Toujours prompte à aller me promener, je suis ma mère à un petit salon des artisans dans un bled voisin. Quelques stands de ci, de là, une petite buvette avec café et crêpes. Le genre de petit événement que j’aime bien. Au détour des allées, je tombe sur une dame qui vend des petites vitrines diorama. Et là, je vois la lumière. C’est ça, mon grand projet DIY ! L’évidence ! Parce que moi, ce que j’aime dans la vie, ce sont les toutes petites choses. Comme mon chat et les petits dessins que je fais dans la marge de mes cahiers !
On lance, on lance et puis…
Je me suis enthousiasmée et je me suis lancée dans quelques trucs. D’abord acheter des livres. Au moins quatre ou cinq, merci la suggestion Amazon. Depuis, j’ai abandonné ce site de Satan. Ah, il faut garder plein de trucs qu’on va pouvoir récupérer donc c’est parti pour empiler des dizaines de cartons de toutes sortes et de toute épaisseurs, de jolies images, des emballage en plastique transparents un peu épais genre barquettes de myrtille. Mon syndrome de Diogène s’épanouissait ! J’ai même créé la page Facebook de ma future marque de vitrines diorama. Et puis rien. J’ai buté sur l’étape “acheter du carton plume”.
Acheter les livres et ne rien en faire
J’ai fait la même avec les perles miyuki mais en un peu moins extrême. Je me suis contentée d’un livre et cinq tubes de perles. J’ai essayé deux ou trois fois, je comprends rien aux explications et je ne sais plus où j’ai rangé mon fil de nylon. Quant au tricot, je dois avoir une vingtaine de pelotes qui traînent dans l’appart. J’ai néanmoins réalisé un gilet. Dans des proportions si grotesques que je l’ai fini et je l’ai jeté. A peu près. Mais quand je me lance dans ce genre de projets, je suis galvanisée. C’est même pour ça que je le fais. Longtemps, je me suis définie comme une droguée de la nouveauté. Dès que j’apprends un nouveau truc, dès que j’ai une nouvelle marotte, ça vire à l’obsession. Et c’est chouette d’avoir de l’élan, peu importe où on le trouve, hein…
Tout ça n’est qu’une fuite en avant
Mais n’est-ce pas une formidable fuite en avant. Ce que je recherche dans tout ça, c’est l’effet Lune de miel. La satisfaction d’arriver à faire un truc, de voir les pièces s’enclencher avec facilité. Waouh, maintenant, je sais faire ci ou ça ! Quel accomplissement, les amis ! Il doit y avoir de la dopamine dans cette histoire ou je ne sais quoi. Alors mon esprit galope. Ah mais je pourrais créer un blog sur le sujet, faire des vidéos Youtube. Tiens, je vais regarder des vidéos pour voir comment faire des vidéos. Parfois, je tombe dans de telles obsessions… Genre j’ai dû regarder toutes les vidéos “anime” autour du spectacle Heathers. Et évidemment, je veux faire pareil. Alors que je sais même pas dessiner.
Tout se passe dans ma tête
Je vis presque dans l’anticipation de tout ce que je pourrais faire et l’imaginer me donne presque la sensation de l’avoir fait. J’ai dans ma tête des images très précises de “Dystopie”. Mon émission Youtube sur les dystopies. Celle qui n’existe que dans ma tête, oui. En général, je considère qu’avoir l’enthousiasme d’un nouveau projet m’indique que je rentre dans une phase plus positive de ma vie, plus énergique. Finis les week-ends à bader sous mon plaid en me nourrissant exclusivement de Shokobons ! Je reprends ma vie en main… aaaah toujours cette notion de “reprendre sa vie en main” si chère à ma psyché, vous avez vu. Mais est-ce que je ne confonds pas les choses. Est-ce que le projet, quel qu’il soit, n’est pas plutôt un truc qu’a trouvé mon cerveau pour ne pas penser à ce qui ne va pas vraiment ? Une fuite en avant. Celle du titre, oui.
Fuir sa vie en se noyant dans les projets
J’en suis persuadée. L’autre jour, je regardais une vidéo d’une coach de vie que j’ai pas mal suivie à un moment mais que j’ai lâchée car elle m’angoissait avec son rythme de vie too much. Genre “ah mais je dors peu, je fais une nuit blanche par mois”. Bah cool ta vie Josette mais t’as un peu conscience que c’est pas trop un exemple à suivre ? Même le gars du projet qui, soit disant, dort peu prend plein de vacances parce qu’il est fatigué. Et là, ça m’a sauté aux yeux. Alors qu’elle parlait d’un nouveau projet qui lui a pris énormément de temps, j’ai vu ce mot écrit en lettres de feu sur sa vidéo “FUITE EN AVANT”. Je ne juge pas cette personne parce que je ne la connais pas IRL, ce n’est pas du tout mon propos. Mais cette hyperactivité de projets, ce besoin d’être occupée tout le temps, de ne jamais se poser… c’est la meilleure façon de fuir ses problèmes. Alors pourquoi pas ? Peut-être que tous les problèmes n’ont pas vocation à être résolus et qu’on a aussi le droit de ne pas les affronter de front. Là où je suis un peu plus gênée, c’est sur un discours en mode “ma vie exemplaire, je peux tout faire, vous aussi”. Sans doute que si je faisais passer mes nuits de 7 à 4h, je ferais plus de trucs. Mais j’aime dormir et être fatiguée ne me rend pas très heureuse, en vérité.
Fuir, ok… mais en toute conscience
Bref, je ne vais pas arrêter de faire des projets même si j’ai conscience que c’est une fuite en avant et que la principale chose que j’essaie de fuir, c’est l’ennui du moment présent. Parce que oui, la vie est moins fantastique qu’on ne le croit et… ça fera l’objet de mon prochain article du lundi. Bisous !