La mèche blanche 

La mèche blanche 

Je trouve que mon rapport au corps est toujours intéressant à analyser, surtout en tant que femme. Bah oui, mon corps est un objet social soumis à tant de normes. Je dois être jeune, fermé et mince, le cheveux soyeux, le poil éradiqué. Plus toutes les modes qui m’imposent un certain maquillage, une certaine manucure. Des modes dont on se moquera dès qu’elles tomberont en désuétude avant de la ré-adopter à son retour. Genre, là, c’est le mulet qui revient. Et à propos de cheveux, j’ai fait une terrible découverte récemment : j’ai une mèche blanche. 

La femme à la mèche blanche
(c) Kelly Newton

Mon corps, cette entité que je ne me représente plus

J’ai pas mal ignoré mon corps ces derniers mois. Si je reste propre et bien hydratée, le fait de ne vivre quasi plus qu’en legging et assimilé a comme dissous la perception de mon corps et de ses limites. J’ai grossi, je ne rentre plus dans pas mal de mes fringues. L’inactivité et la cuisine vite fait le midi, ça n’aide pas mais je ne me sens pas trop mal dans ce corps. Il ne m’empêche pas de bouger comme je veux. Mais, fun fact ou pas, je n’arrive plus à me le représenter correctement. Surtout mon ventre qui me paraît énorme et proéminent mais c’est encouragé par mon transit désastreux. Donc ce corps, je le laisse vivre sa vie. Je le bichonne à coup de crème hydratante qui sent bon. Je suis contente quand mes muscles s’agitent à la cool quand je marche, je soupire d’aise quand je l’étire. 

J’étais la coqueluche des coiffeurs

Et puis, il y a mes cheveux. Je leur fous la paix depuis septembre. Plus de couleurs, surtout, j’ai retrouvé mon… alors les gens sont jamais d’accord. Selon les coiffeurs, c’est blond foncé, certains disent châtain clair. Moi, je trouve que ça fait blond cendré. Comme mon papa. Ce monsieur passé du blond cendré au gris sans qu’on s’en rende vraiment compte. Puis au blanc éclatant. Pendant longtemps, j’étais la femme sans cheveux blancs, je m’enorgueillais à chaque fois chez le coiffeur. Quand le premier est apparu et qu’une coiffeuse me l’a annoncé d’un ai contrit, j’ai fait ma maline en mode « oh, vous savez, j’ai 38 ans ». Et c’est reparti pour une volée de compliments. Oui, les coiffeurs adorent mes cheveux. 

Chez le coiffeur pour masquer la mèche blanche
(c) Adam Winger

J’ai vieilli des cheveux

Mercredi matin. Je me prépare à aller au travail. Brossage de dents, coup de brosse et, dans un excès de coquetterie, je décide de glisser une barrette pour dégager ma tempe gauche et… pardon ? Quoi ? Cette mèche-là, elle n’est pas blonde… elle est blanche ! J’avais bien vu deux ou trois fils argentés mais là, c’est une mèche. Une mèche blanche. Ah merci ma boîte toxique à la con, hein. Et en même temps, j’ai tendance à oublier que j’ai déjà 41 ans. J’en connais qui, à mon âge, avaient les cheveux tous gris. Genre mon papa. 

Devenir une madame

Cette mèche blanche n’est-elle pas l’occasion de jouer mon identité ? Je pourrais jouer les madames en choisissant un style vestimentaire un peu plus classique. Moins de jeans-baskets, plus de pantalons tailleurs et bottines. Moi qui me sens usurpatrice parce que je me trouve trop jeune pour accéder à des responsabilités. Hé oui parce que dans ma tête, j’ai 27 ans… au max. Enfin, je pourrai assumer mes compétences, mon expertise. Ne pas passer pour une post-alternante qui se la pète bien pour une si jeune fille. Et puis, si je fais madame, on considèrera peut-être que j’ai fait ce que j’avais à faire de ma fertilité et on ne m’ennuiera pas avec ça. Mes cheveux blancs qui se multiplient sont-ils la porte que j’attendais pour entrer pleinement dans l’âge adulte ? 

Ou alors, j’assume ma griserie et je file chez le coiffeur me faire une teinte argentée-bleutée… Non, décidément, la maturité et la sagesse, c’est pas ma came !

Les cheveux bleus
Genre cette coupe

  

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