Juste une question de mérite
Ou pas. Je fais pas mal de vannes à base de “ou pas” en ce moment, je vais cesser, promis. Mais en attendant, laissez-moi enfiler quelques platitudes à base de “la vie”. Parce que la vie est faite de succès et d’échecs. Parfois, à mes heures perdues, j’aime détricoter mon parcours en imaginant ce qu’il aurait été si j’avais réussi tel truc (exemple : mes concours pour entrer à l’école de journalisme) ou échoué autre chose, pourquoi pas. Ah, l’échec, ma grosse pilule que j’ai toujours du mal à avaler. Je rumine “c’est pas juste, je méritais de réussir”. Je mérite ? Mais qui mérite quoi ?
Tu mérites… ?
Alors cet article s’inspire complètement de la vidéo de Linguisticae sur le mérite que je vous encourage franchement à regarder. Je vais pas vous refaire son laïus parce que j’ai plus envie de me pencher sur les applications concrètes, en quelques sortes, de cette notion de mérite. Et aussi parce que la vidéo mérite absolument une demi-heure de votre temps. La question que je veux poser ici, c’est “sommes-nous toujours responsables de nos échecs ?” parce que niveau terreau pour des pensées limitantes, je pense qu’on est pas mal.
Mantras vs réalité
Vous savez ce que je déteste ? Les gens qui te balancent des “qui veut peut”, “ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait” ou les “ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient” pour t’expliquer que tout n’est question que de volonté pour réussir. Alors déjà, la réussite, c’est quelque chose d’un peu personnel, je dirais. Voire un asservissement supplémentaire dont j’ai déjà parlé par ailleurs. Pour ma part, je place la réussite plus sur mes succès de routine (pas très nombreux, j’ai pas encore mon équilibre) pas sur des “hé, je suis la fondatrice d’une start-up licorne !”. Mes ambitions s’arrêtent à faire une broche licorne en perle hama. Evidemment, j’aimerais parvenir à lancer un peu mieux mon écosystème dystopie (abonnez vous, Facebook, Twitter, blabla) mais je mériterais peut-être plus le succès si je m’en donnais les moyens. Mais, je le disais la semaine dernière, la réussite contient une donnée essentielle : la chance. Déjà, naître du bon côté de la barrière, fréquenter une bonne école, faire des études supérieures… ça joue.
Le talent à jamais caché
Regardez autour de vous tous ces gens talentueux. Vous aurez forcément une belle plume, une belle voix, un style de dessin incroyable, une maestria à la guitare, un acting fabuleux… Vous connaissez forcément quelqu’un qui gagne à être connu, comme on dit. Sauf que tous les talents n’ont pas pour destin d’être reconnus. Oui, ça fait un peu mal dit comme ça mais nous savons tous que c’est vrai. Parfois parce que la personne ne fait rien pour que ça arrive. Parfois aussi parce que les portes ne se sont pas ouvertes, que le timing était mauvais. Je vous ai peut-être fait sourire la semaine dernière avec mes histoires de signes mais la chance est un facteur. Evidemment qu’on peut se créer sa chance. C’est sûr que ce sera plus facile pour moi d’être publiée si j’envoie mes manuscrits à un éditeur et que je me raconte un peu comme écrivaine sur les réseaux sociaux. Soyons concrets. J’ai taclé gentiment un Youtubeur science qui n’a pas de bagage scientifique mais s’est déclaré expert parce qu’il allait coprésenter C’est pas sorcier. J’ai rien contre ce garçon, j’ai même vu son spectacle. Est-il légitime comme “scientifique” ? Non dans l’absolu même si je suis pas de ceux qui ne jurent que par le diplôme. Est-ce qu’il ne mérite donc pas ce job ? Là, j’aurai du mal à me montrer si affirmative.
Cahier des charges suivi
Le gars remplit pas mal le cahier des charges, il me semble. Il parle bien, fait de l’humour, ce qui le rend assez qualifié pour les médias audiovisuels (il a aussi une chronique sur France Inter). Est-il le meilleur pour le poste ? Peut-être que non. Mais il a fait en sorte de produire du contenu et a réussi à avoir de la visibilité. Peut-être parfois en étant un peu racoleur, certains lui reprochent une ou deux vidéos expliquant l’origine scientifique de l’homosexualité, ce qui est faux. Pour finir : se tromper, ça arrive mais quand on se confère une aura d’autorité sur un sujet, c’est un peu plus compliqué.
Le résultat compte-t-il ?
Bref, se défoncer sur un projet en ayant les capacités ne sera jamais un gage de réussite. Ce ne sera pas forcément juste, vous n’avez pas forcément démérité. Juste que vous avez pas eu de chance. Sans doute qu’il y a des choses à améliorer mais finalement, ça pose la question. Est-ce que le résultat compte vraiment ou faut-il se focaliser sur le chemin ? Je crois qu’un facteur important d’échec, quel que soit le sujet, c’est d’avoir rêvé un résultat qui n’est pas arrivé assez vite. Ou de faire des choses juste pour avoir du succès. J’aurais voulu devenir une star du blog, j’aurais arrêté en 2007 quand, en commençant à travailler, j’ai un peu arrêté de commenter à droite à gauche… et arrêté de parler de fesses, aussi. Mais j’ai plaisir à faire ce que je fais donc le résultat (le succès) serait in fine un bonus.
En fait, tout est question de réel objectif… On en parle semaine prochaine !