La bonne balance des personnages : le cas Dirk Gently
Le plus dur quand on écrit, c’est de monter des personnages crédibles. Pour raconter une histoire, il faut l’incarner et, selon notre bagage culturel, on va taper dans des stéréotypes. Oui, désolée mais un personnage de fiction ne peut être que la somme de certaines caractéristiques. A moins d’écrire un roman de 5000 pages sur la journée d’un personnage (même James Joyce n’a pas fait autant alors que son Ulysse… bref), on ne peut décrire la nuance d’une personne dans une fiction. Et on se retrouve parfois avec des personnages clichés INSUPPORTABLES. Et parfois, on se retrouve avec de sacrées pépites. Comme dans la série Dirk Gently.
De la bonne fiction barrée
J’aime bien les fictions un peu barrées. A la recherche d’une nouvelle série sur Netflix, nous tombâmes sur Dirk Gently. Ca avait l’air assez rigolo et puis j’ai une certaine sympathie pour Elijah Wood… Enfin, je crois. A la réflexion, il me laisse assez indifférente mais au moins, il ne m’énerve pas, voilà. L’histoire en gros : Dirk Gently est un détective holistique qui mène des enquêtes à la frontière du paranormal, aidé de son assistant revêche. En gros : vous prenez X-files, HG Wells, un soupçon de Cameleon aussi, sans doute un peu de Dr Who mais je ne connais pas la série donc je dis peut-être n’importe quoi, un humour un peu absurde et ça donne Dirk Gently. Alors je ne parlerai pas plus de la série en tant que telle mais je la conseille, surtout la saison 2 même si dans la saison 1, y a Julian McMahon qui a un rôle assez cool (le Dr Troy dans Nip/tuck ou le diable dans Charmed, là). Et un putain de chevalier Steampunk. Mais dans la saison 2, y a un royaume enchanté avec un train qui vole et tellement d’idées géniales… Bon bref, je recommande la série.
100% personnages attachants
Mais en fait, ce que j’aime dans cette série, ce sont les personnages en demi-teinte. Bon, je suis absolument amoureuse d’Amanda et sa tête de poussin perdu loin de son nid. Amanda, par exemple, qui est une petite chose fragile en début de série et qui devient furieusement badass par la suite. Ensuite, on a Dirk. Dirk, sur le coup, je me suis dit « oh putain, c’est un Sherlock sauce Cumberbatch ». Sachez que j’ai détesté cette série, je n’ai jamais compris l’engouement et vous m’inquiétez à kiffer autant les personnages toxiques. Du coup, sur le coup, j’étais un peu en mode nez plissé mais l’écriture est si juste que son côté un peu agaçant est très vite oublié. Idem pour Todd ou le gang d’Amanda qui devrait représenter absolument tout ce que je déteste… non qui représente tout ce que je déteste mais qui est suffisamment équilibré pour que ça passe. Bart aussi, qui m’agaçait au départ mais qui finit par être hyper attachante.
De l’art de l’équilibre
Ecrire un personnage est vraiment l’art de la bonne balance. Pourquoi j’ai à ce point aimé cette série ? Parce que les personnages ne sont ni tout noir ni tout blanc, ils connaissent une évolution et surtout, leur côté irritant est très bien contrebalancé par un côté attachant. Parce qu’honnêtement, j’en peux plus des personnages problématiques soit disant subversifs qu’on est censés accepter tels quels parce que ce sont des génies ou qu’ils sont censés avoir du charisme ou je ne sais quoi ? Non mais sérieusement, il est où le charisme de Gibbs de NCIS ? Le mec frappe ces collaborateurs, bordel ! Il ne mérite aucune reconnaissance, juste un entretien préalable au licenciement. Même Fallon Carrington qui est écrite pour être horripilante est plus sympathique que ce mec là. Dans Dirk Gently, dès qu’un personnage devient un peu agaçant, une péripétie le fait redescendre.
50 nuances de gris
Et il ne suffit pas de mélanger du blanc et du noir pour avoir un joli gris. Si je prends Riverdale qui est une série qui commence à sérieusement me saouler aussi (je vais ouvrir mon blog télé, je vais pas m’en sortir sinon tellement je dois écrire de trucs), ils aiment bien écrire des personnages totalement paradoxaux, jusqu’à en devenir des clichés. Genre la jolie Betty, petite vierge effarouchée derrière laquelle se cache une nympho dangereuse ou Cheryl Blossom qui cache ses failles narcissiques derrière une confiance en soi colossale. Cheryl, c’est trop le prototype de la méchante pas si méchante… même Azoulay a utilisé cette ficelle dans Hélène et les garçons (souvenez-vous la machiavélique Nathalie qui devenait épisodiquement gentille en mode « ohlala, j’ai été si méchante avec vous, comment ai-je pu ? »). C’est grossier et peu crédible. Alors que dans Dirk Gently, ça passe parce que c’est subtil.
Bref, regardez cette série, vous passerez un bon moment puis y a un train volant dans une ambiance vachement plus sympa que Galaxy Express 999.
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