Je suis revenue
En début d’année, j’avais des ambitions pour 2025. Une feuille de route assez claire. Avec un point d’orgue : un voyage en Nouvelle-Zélande vers octobre. Patatras, Robert en a décidé autrement. Me voici donc fauchée en plein vol. Enfin, en plein vol, ça reste à nuancer : j’étais déjà en pleine crise professionnelle. Ras le bol de ce métier à la con mais que faire d’autre ? Bref, j’étais pas au top, Robert m’a fait tomber encore plus bas mais un jour, enfin, j’ai pu l’annoncer : je suis revenue.
D’abord, mon corps a lâché
Je dois avouer que je ne m’attendais pas à chuter ainsi. Physiquement, surtout. Enorme fatigue, hypertension, vertiges. Bon, sur ce dernier point, je soupçonne un truc aux oreilles car ça affectait également la vue, chaque crise s’accompagnant d’une inclinaison du monde. Vraiment, ma vue me montrait un monde incliné sur la droite alors que mon corps évoluait bien sur un monde plat. Le regard, justement. Dans les premiers jours après l’annonce et le choc, finalement, je ne “tenais” pas mon regard. J’avais beaucoup de mal à le fixer, celui-ci partant très vite dans le vague. Tout ça venant pour l’essentiel d’un problème de concentration. Je n’arrivais plus à écrire, je ne retenais rien ou si peu. A un moment, je devais aller voir une copine. J’ai dû vérifier régulièrement le plan car je ne me souvenais plus que de deux noms de rue. Et j’avais une grosse pièce de théâtre à apprendre, youpi.
Une bulle d’air qui aide
Et puis, c’est revenu. Je suis revenue. Je crois que ce fut lié au prolongement de mon arrêt maladie. Ca m’a reboostée comme si j’avais avalé une bulle d’air dans les niveaux aquatiques de Sonic. J’avais deux semaines devant moi, le temps d’aller voir une avocate, de faire du sport. De revenir fière et forte. L’écriture a redémarré à ce moment-là, aussi. L’écriture, c’est mon thermomètre. Plus j’écris facilement, mieux je vais. Typiquement, les jours où je suis fatiguée ou préoccupée, ça se ressent direct dans mon style qui s’alourdit, les répétitions se font plus nombreuses. La perte de sens, parfois aussi. Quiconque me lirait aurait du mal à comprendre le sens de mes propos. Moi-même, parfois, je m’arrête en pleine phrase, me grattant la tête car je ne comprends pas bien où je comptais en venir. Oh…
Déjà, je suis d’humeur aléatoire
Naturellement, je suis quelqu’un un peu up and down. J’enchaîne les périodes de très bonne humeur et celles de noires pensées. Vraiment, je peux passer d’une période où je suis exaltée, ayant l’impression que la vie peut tout m’offrir, à une autre où je suis affalée sur mon canap’ à jouer à Candy crush ou regarder pour la vingtième fois le même extrait de Friends en me disant que je suis une petite crotte molle de pigeon. D’ailleurs, je pense être leur cible préférée car la vie aime me rappeler régulièrement ma véritable nature. Bref, un jour, je veux conquérir le monde, le lendemain, me retirer dans une grotte pour toujours. Fatigant ? Oui, surtout que ça nuit à mon self esteem et mes projets. Genre à jeter un manuscrit de 300 pages parce qu’au fond, à quoi bon ?
Ces autres versions de moi que je voudrais être
Dans mes périodes de down, justement, je me languis de la moi en pleine forme. Celle qui se lance sans peur dans des activités, celle qui a trente idées à la minute. De nouvelles lubies. Potentiellement, celle qui s’éparpille, oui. Et qui a le portefeuille qui démange car il y a plein de choses à acheter pour devenir cette nouvelle version de moi-même. Parfois, quand je suis en mode down, je me languis aussi de la moi neutre. Celle qui s’en fout, globalement. D’ailleurs, avec mon hypno, le but, c’est de transformer la down en moi, neutre. Parce que vraiment, s’en foutre, c’est reposant. Et ce n’est pas de l’indifférence dépressive, non. Juste un détachement. La sensation que la vie est absurde donc pas la peine de chercher à remonter le courant à tout prix. Se laisser porter en profitant du paysage.
I’m back, baby
Toujours est-il que quand je passe en mode up ou mode neutre, cette sortie de la phase down est une délivrance. Car si je peux admettre que mon moi est multiple, comme tout le monde, j’ai le ressenti que ce pantin abandonné qui n’arrive pas à regarder droit devant lui, ce n’est pas moi. Ou alors c’est le mode que j’accepte le moins, c’est en cours d’analyse, ça. Toujours est-il que fin mai ou début juin, en cours de comédie musicale, la prof me demande d’interpréter ma chanson avec la chorégraphie qui va avec. Chorégraphie qui consiste notamment à secouer la tête. Impossible dans ma phase de vertiges. Non mais pour situer : même l’aquagym était trop intense pour moi à ce niveau. Quand on faisait une succession de sauts et que je retombais dans une eau agitée, avec les vagues me faisant un peu bouger, mes yeux s’affolaient, incapables d’attraper un focus et j’avais la tête qui tournait de fou. Bref, j’exécute ma chorégraphie de façon brouillonne, ne l’ayant pas exécutée depuis deux mois. La prof me demande si ça va aller pour le spectacle qui est imminent, je lui réponds : “oui, t’inquiète, je suis revenue”. Sourire complice de l’autre fille qui a vécu le même choc que moi environ un mois plus tôt. On se sait.
Ah donc la meuf en bad, c’est pas moi
Mais je trouve cette idée de “je suis revenue” intéressante. Parce que cette phrase en dit tellement plus sur moi que ce que j’en avais conscience au moment où je l’ai prononcée. Ainsi donc, la phase down, ce ne serait pas moi. Du moins pas mon mode normal. Il n’est pourtant pas nouveau, cet état-là. Il fait partie de ma vie depuis toujours. Bon, là, j’étais à un niveau down très profond. Pas forcément le pire que j’ai connu mais dans le top 3 des pires bads de ma vie, je pense. Déjà à cause de cette histoire de vertiges, quand même un peu handicapant et flippant. Surtout quand ça t’arrive alors que tu es sur un vélo. Mais cette phase down, elle est la cause de la plupart de mes tourments. J’ai commencé à voir l’hypno pour ça. Parce que cette phase down m’incite à penser que je suis nulle et me fragilise. Le fait que le crash soit arrivé pile à la sortie d’une phase down où je me répétais H24 que je n’avais aucune compétence et que je ne m’en sortirais jamais a fait très très mal. Et encore, merci Venise d’avoir remis du baume au coeur parce que là, ce ne sont pas trois Atarax en passant qui auraient pu me sortir de ce marasme.
Mais c’est quoi cette phase down ?
La phase down ayant été violente, le Rise like a phoenix a été d’autant plus intense. Je suis revenue, oui. Mais cette autre version de moi était-elle réellement une anomalie ? Un hiatus de l’histoire ? Un bug de ma personnalité que je peux supprimer. Va falloir explorer ça.