Ne minimise pas tes victoires

Ne minimise pas tes victoires

Même les plus petites. L’autre jour, je traînassais sur Threads quand je tombe sur un post d’une jeune femme se réjouissant d’avoir écrit un certain volume de mots. Son post se construisait ainsi “je suis trop contente, j’ai écrit X mots. Je sais que pour certains, c’est peu mais pour moi…”. Après avoir liké, je décidais de lâcher un comm. “C’est une victoire et c’est tout, y a pas à la diminuer.” Et j’ai écrit ce comm en ayant parfaitement conscience que je me foutais un peu de la gueule du monde car je suis la première à tout atiédir. Culture de la modestie nulle. Donc aujourd’hui, on va apprendre à être fière de ses victoires, sans aucune concession. 

Célébrer ses victoires
(c) Saad Chaudhery

Déjà, on va balayer un sujet. Je n’ai pas analysé en détail les messages minimisant les victoires mais je suis persuadée qu’ils sont postés à 80% par des femmes. Déjà de par notre éducation. Faut pas faire trop de bruits, rester à nos places, vous connaissez les bails. Et à l’ère des réseaux sociaux, tu peux être sûre que dès que tu veux te vanter d’un truc, y aura toujours un soldat du masculinisme qui viendra immédiatement te rabaisser. Au mieux avec un stupide “on s’en fout”, au pire avec une bonne dose d’humiliation. Je veux dire, on parle de gens qui sont persuadés qu’ils peuvent battre n’importe quelle championne, Serena Williams inclus. L’audace, quand même…

Et pourtant, il n’y a pas de petite victoire. La vie est suffisamment complexe et frustrante pour bouder notre plaisir. La question, ici, n’est pas de mesurer notre succès à l’aune des autres parce que… on trouvera toujours plus fort que nous. Prenons l’exemple du running. Exemple que j’adore parce que j’ai toujours pas couru un seul mètre depuis que j’en parle. N’ayant jamais su courir, je me mets un objectif de 1 km. Ce qui représente environ 17% de La parisienne, 4% d’un semi-marathon et 2% d’un marathon. Peanuts. D’autant plus peanuts que je bosse avec des accros de trails et autres courses intenses. Y en a même un qui court de nuit dans la forêt. Tema le privilège masculin… Evidemment, si je commence à comparer mon kilomètre à ces grands sportifs…

Faire du jogging
(c) Francesco Albertazzi

Sauf que moi, à la base, je déteste courir. Je fais partie de ces gamines trauma par l’endurance en cours d’EPS. Oui, me dire “cours 20 minutes et essaie de ne pas mourir”, c’est un peu sec comme consigne. Surtout que je n’étais pas du tout sportive à l’époque donc réguler son souffle, ça ne me parlait pas. Du coup, trente ans plus tard, je manque d’air dès que je vois des personnes courir pour leur vie dans des séries télé. Calée sur mon canapé, je suis catégorique :”oh moi, je me laisserais bouffer par le zombie”. Pour vous dire : dès qu’un personnage se met à cavaler, je me mets à réfléchir à une bonne planque parce que courir pendant plusieurs minutes ne me paraît pas un bon move.

Alors oui, courir un kilomètre serait déjà une sacrée victoire pour moi. Comme le fut mon adoption du vélo. Petit résumé des épisodes précédents : plus jeune, j’étais nulle en vélo (aucune endurance). Puis arrivés sur Bordeaux, Victor a voulu à tout prix qu’on s’achète un biclou. Un chacun, j’entends. Peu motivée, j’achète un elops Décathlon et c’est… l’enfer. Vraiment, si vous voulez acheter un premier vélo, prenez plutôt une occasion et si vous trouvez un Arcane… Et oui, depuis que j’ai mon vélo Arcade, je ne me déplace plus que comme ça. J’en viens même à prendre mon vélo pour aller en centre-ville car “flemme d’attendre le tram”. Quand je vois une annonce d’emploi qui me plaît, je regarde le trajet pour y aller en vélo et pas en transports. Bon après, vu l’offre de transports bordelaise, le vélo reste la meilleure option. 

mon vélo sur le bato

Les victoires se mesurent à l’aune de chacun. Par exemple, en ce moment, j’ai retrouvé l’écriture grâce au classicisme nanowrimo. En novembre, je m’étais fixée un objectif de 30 000 mots. 1000 par jour. J’en ai écrit 29 300 et je fus très fière de moi. Plus pour ma ténacité que sur la qualité du truc, c’est clairement un premier jet. Y a des digression dans tous les sens. Moi, ça m’amuse mais de là à penser que ça puisse intéresser quelqu’un de lire ça… Donc 29 300 mots. Et là, je vois un mème posté par un auteur “quand tu écris 50 000 mots pour le nanowrimo/quand tu penses au travail de réécriture à venir”. 50 000 mots, presque le double de moi.

Ok sauf que :

  • Je suis salariée temps plein
  • J’écris aussi des blogs
  • Je fais des puzzles et parfois des bracelets brésiliens.
  • Je suis allée voir Doully, Nora Hamzaoui en spectacle et Phantom of the paradise au ciné.
  • J’ai fait une soirée avec mes actuels et ex collègues.
  • J’ai 44 ans, j’aime mieux la tisane et dormir 7h que carburer au café et me coucher à 3h du mat.
  • J’ai souvent un chat qui dort sur moi. Genre là, je tape mon article sur mon téléphone car j’ai la duchesse du Bidou qui dort sur les genoux où je pose mon nécessaire à écrire. 
Duchesse du Bidou m'empêche d'écrire

Oui, il y aura toujours quelqu’un qui fera mieux. Qui courra ou écrira plus. Qui fera du vélo musculaire plus vite. Oui parce que me faire dépasser par des vélos électriques, ça ne compte pas. Des qui dessineront mieux que moi, qui chanteront mieux que moi. Qui auront un appart super bien rangé et décoré avec soin. Ou qui feront la position du corbeau alors que moi, non. Et on s’en fout. Ce qui compte, ce n’est pas où en sont les autres. Ce qui compte, c’est sa propre progression.

Alors célébrons nos victoires. Arrêtons de les appeler “petites” si ce sont des choses importantes pour nous. Je veux dire, oui, voir le tram arriver en même temps que vous sur le quai, ça ne mérite pas un feu d’artifices. Ni le fait de faire tout son trajet de velotaffeuse avec tous les feux au vert. Même si ça fait grave plaisir parce que les deux minutes gagnées vont pouvoir être investies dans du flânage. Je déteste me presser pour aller au bureau. Mais tout ce qui constitue une étape symbolique pour nous mérite d’être souligné, encensé. Peu importe si, pour les autres, ça ne représente rien.

Chaque victoire compte
(c) Nathalie Désirée Motter

Et pro tip : si un mec vient se foutre de la gueule de votre victoire : bloquez. Ca éclaircira votre ciel et peut-être que le méchant troll, à force de ne plus avoir d’espace pour être bête et méchant, fera un truc utile de son temps.  

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