De la nostalgie de l’instant présent

De la nostalgie de l’instant présent

Cela fait des années que je n’ai plus lu de livres de développement personnel. D’abord parce que je suis agacée par leur vision simpliste de la vie à base de “faut qu’on, y a qu’à”. Oui, ce qui coûte, c’est le premier pas, les habitudes, c’est la vie… J’en suis convaincue mais les sauces miracle de gens privilégiés, bof. Et puis je ne lis plus la semaine dernière où j’ai trouvé cette notion de nostalgie de l’instant présent et j’ai ressenti le besoin d’écrire dessus tellement ça met le doigt sur un de mes ressentis presque poison.

La nostalgie du moment présent, quand on sait que le bonheur va s'arrêter
(c) Priscilla du Preez

Un bonheur mâtiné de tristesse

Parmi les romans que j’ai lu récemment, il y a “Ainsi gèlent les bulles de savon” de Marie Vareille. Ce qui est amusant, c’est que dans ce roman, un des personnages trouve une citation de Flaubert et s’ébahit de trouver des mots d’une autre personne qui la décrivent point pour point. Et moi, j’ai été frappée par un passage. Celui où un personnage a la conscience de vivre un très beau moment et ressent une pointe de tristesse car iel sait que ça ne va pas durer éternellement. La fameuse nostalgie de l’instant présent.

Profiter tout le temps, presque par obligation

Je dis souvent de moi que je ne sais pas profiter de l’instant présent. Je suis plutôt angoissée donc j’essaie de tout anticiper, stressant limite pour des choses qui n’arriveront pas. La fatigue. Mais il y a aussi un autre sentiment. Plus pervers. Je me sens obligée de kiffer à fond, de profiter tant que possible en pensant que ça ne durera pas. Je m’explique. Pendant deux étés, je n’ai pas travaillé et je suis allée me la couler douce au lac. Deux étés merveilleux, surtout aujourd’hui avec la patine du souvenir. J’ai particulièrement aimé l’édition 2023 car je savais qu’un job m’attendait à la rentrée. Mais du coup, je me faisais limite violence pour aller au lac tous les jours ouvrés avec cette perspective qu’à un moment, ça allait s’arrêter…

Vue sur la Garonne à Bordeaux

Comme une tristesse de bonheur

Cette notion de profiter jusqu’à la dernière goutte, déjà, elle est un peu compliquée pour moi. Sans doute parce que j’ai une passion sans bornes pour mon auto-flagellation. Celle qui me hurle “mais profite, connasse, le temps est compté, ça ne va pas durer !”. De la même façon, il y a des fois où je ressens comme une “tristesse de bonheur”.

Le parfait bonheur a forcément une fin

Par exemple, nos vacances en Camargue ont été particulièrement réussies. Pas tant grâce au lieu choisi même si on a vu de très belles choses, mais parce qu’on a profité. On s’est reposés, on a vu de belles choses, on a vécu en harmonie pendant huit jours. Un plaisir rare avec nos vies de con le reste de l’année. Le dernier jour, alors qu’on se promenait sur le bord de mer à Saintes-Maries de la mer, je me sentais à la fois bien et triste. Le présent était parfait : soleil, température douce, petite brise parfumée à l’iode, pas de foule. La quatuor gagnant. Mais une part de mon esprit anticipait le retour à Nîmes pour rendre la voiture que j’avais un peu rayée. Le stress du train, la perspective du retour… Même si, depuis qu’on vit à Bordeaux, les retours sont moins moroses. Ah ça, je vais galérer pour sortir de ma boîte toxique vu le peu d’opportunités mais à côté de ça…

Stes Maries de la mer

La fin du lever de soleil

Je trouve ça bien, dans l’absolu, d’avoir conscience de vivre un joli moment. Un moment qui sonne parfait. Mais cette tyrannie du mental qui ne peut s’empêcher de nous tapoter sur l’épaule pour nous susurrer que ça va pas durer, que c’est bientôt fini. Comme quand je me levais à 6h du mat aux Philippines pour aller mitrailler le lever de soleil. A un moment, le soleil quitte l’horizon, le ciel prend une teinte plus bleutée et la séance photo est terminée. Les moments parfaits ne durent jamais. 

Les souvenirs se bonifient

Et pourtant, j’ai un contre-feu déjà évoqué plus haut : la patine du temps. En ce moment, je déménage de vieux articles des vingtenaires et sur ce blog, je publie notamment mes récits de voyage. Notamment la Thaïlande et ma première rencontre avec une raie manta. J’en garde un souvenir très vif mais en republiant l’article, j’ai eu l’intuition assez forte que si je re visionniais une vidéo de ce moment, ce ne serait pas aussi grandiose. De la même façon, il peut m’arriver d’être déçue par un lieu qui m’avait marquée plus jeune parce que… la patine du temps. Je lui consacrerai un article à l’occase… Bref, plutôt que de chouiner de la fin prochaine des choses, essayons de nous concentrer sur l’exaltation de nos sens au moment présent. Sachant que dans quelques mois, y a des chances que ce souvenir se soit bonifié.

Raie manta
(c) Nicolas Weldingh

Vacances sous la pluie en approche

Et cet avec cet état d’esprit que je pars aujourd’hui en vacances. Même si, selon mon appli météo, il va faire moche et qu’on a prévu… le tour du Bassin en vélo… Champions. 

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