L’épineuse question de l’auto-sabotage

L’épineuse question de l’auto-sabotage

Pour se consoler, on se dit souvent qu’il y a des leçons à tirer de tout échec. C’est pas si faux même si parfois les échecs sont aussi des question de pas de bol. Oui, c’est une histoire qui se raconte peu mais qui méritera un article à part entière. Il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. Je veux dire qu’il y a eu des gens, très brillants et très préparés, qui ont lancé un restaurant fin 2019, début 2020… Qu’est-ce qu’un excellent business plan face à une épidémie mondiale ? Bref, tous les échecs ne servent pas de leçon. Sauf quand tu as fait de l’auto-sabotage. Une petite spécialité maison, oui, oui. La question n’est alors plus « pourquoi tu as échoué » mais plus « pourquoi tu ne voulais pas réussir ? » 

De l'art de l'auto-sabotage
(c) Steve Johnson

Un auto-sabotage systématique

En 2020, j’ai donc décidé de tenter l’aventure éditoriale en envoyant des manuscrits de Green !. Pile avant le confinement, j’ai dû me dire que les éditeurs seraient contents d’avoir du boulot. A peu près comme tout individu ayant un manuscrit dans son tiroir. J’avais prévu d’imprimer des versions papier pour les maisons d’édition qui veulent recevoir les manuscrits par courrier mais je suis même pas allée jusque là. Ma partie bio fut un calvaire à écrire, j’ai dû pondre deux lignes nulles. Bref, j’ai bâclé. Tout comme l’auto-édition d’ailleurs. Pourquoi ? J’en sais foutre rien. Mais l’auto-sabotage, il n’est jamais gratuit, non ? 

Les choses que je ne fais pas par anticipation de fatigue

Souvent, ce qui me coupe les ailes, c’est la fatigue. Pas forcément une fatigue réelle, tangente mais plus une anticipation de fatigue. Vous savez pourquoi je me suis jamais mariée ? Outre le fait que je ne crois pas en l’institution du mariage et que je trouve que c’est de l’argent jeté par les fenêtres, je veux dire ? La fatigue par anticipation. Non mais un mariage, c’est délirant tout ce qu’il faut prévoir et faire. Trouver le lieu, le traiteur, qui on invite, prévoir mille et unes choses, tout anticiper jusqu’à l’alcoolémie inévitable de tonton Georges. Fatigue, fatigue, fatigue. En fait plus que la fatigue, c’est que je n’ai pas envie d’investir de l’énergie là-dedans. Mon énergie est précieuse, je veux la mettre dans des choses qui m’épanouissent. 

La fatigue de l'auto-sabotage
(c) Poonam Dhiman

Qu’une question de fatigue anticipationnelle ?

Du coup, l’écriture ne m’épanouit pas ? Ah si, écrire, j’adore. Me faire lire, par contre… Je suis capable de beaucoup m’investir sur un projet. À une époque, j’étais capable de passer une nuit blanche pour un truc à la con. Et on va pas se mentir : si j’étais pas avec Victor, je pense que me coucherais à 5 ou 6h du matin le dimanche après avoir passé la nuit à faire du PowerPoint Art ou à écrire, les yeux explosés et les pupilles dilatées. La fatigue anticipationnelle ne serait-elle qu’un prétexte ? Alors ça dépend. Là, je viens de passer deux mois très intenses au boulot. Trop. Ça m’a un peu cramée et je suis logiquement entrée dans une période flemme de tout. Période qui me frappe pile à mon moment mou de l’année aka l’hiver. La combo de l’enfer. Mais oui, parfois, la fatigue anticipationnelle n’est qu’une bonne excuse. Et typiquement sur cette histoire de publication. Et là, on va rentrer dans une complexité de ma psyché…  bien inutile.

Entre modestie absurde et dépréciation

Tout d’abord, il y a cette éducation qui fait qu’on doit être modeste en toute circonstances. Comment donc se vendre quand on a toujours appris que ce n’est pas une bonne chose de se mettre en avant. Qu’on ne doit pas être péteux ou prétentieux ? Vous allez me dire qu’on peut être fier de son travail sans être prétentieux mais je ne discerne jamais bien la différence. Et puis, en vrai, suis-je si sûre de mon travail que ça ? Je vous parlais là semaine dernière du rêve d’être découverte par hasard, ça ne sort pas de nulle part,. Il est super difficile d’avoir du recul sur son travail et j’aimerais avoir une aide. Quelqu’un qui me confirme que je suis partie sur le bon chemin, que mon travail a une valeur. J’ai une capacité à me déprécier très forte. Limite, je pourrais mettre ça dans mes principales qualités tellement je suis douée pour l’exercice. Ça fait des années que je me dis que je dois être moins méchante avec moi-même, qu’il ne faut pas récrire l’histoire au feutre noir. Arrêter de focaliser sur les fois où je n’ai pas été au top, les « mais » quand on analyse mon travail. 

Analyse de mon travail
(c) Nick Shandra

Pardon de vous déranger

Et puis il y a autre chose. La peur de déranger. Sur Green !, je n’ai jamais demandé de bêta-lecture à qui que ce soit. Et ce pour plusieurs raisons. D’abord j’avais peur des retours. Je prends l’écriture comme exemple mais ça marche pour le travail. J’ai réalisé une grosse prèz récemment et je déteste les moments où je soumets mon travail à une tierce personne. Peur qu’elle me dise que ça va pas. Même avec la meilleure tonalité du monde et moult pincettes. Peur du découragement, de croire que j’étais arrivée au sommet de la montagne alors qu’il m’en reste une encore plus grande à grimper. Sans parler du syndrome bonne élève qui vit sa meilleure vie dans ces moments-là. On couple à ça mon côté peur de déranger et voilà le résultat : j’ai avancé solo de bout en bout de cette aventure. Alors que le collectif fait la force. Je l’éprouve sur le volet chant de ma vie, par exemple. Y a des jours où je me sens moins solide sur mon chant mais j’ai les copains qui me portent. Je dois être à la hauteur autant pour eux que pour moi. 

Plus facile d’assumer un échec parce qu’on a mal fait

Et voici comment j’en arrive à mon auto-sabotage. De un, ça ne concerne que moi donc on s’en fout si ça marche pas bien. De deux, je suis pas sûre de mon coup donc je fais en sorte que l’échec ne soit pas induit par la qualité de mon manuscrit ou de mon travail mais du chemin mal parcouru pour y parvenir. Un peu comme quand tu n’obtiens pas d’entretien parce que tu as envoyé ton CV en 2 minutes, à l’arrache, avec une lettre de motivation clairement pas rédigée pour la boîte pour laquelle tu postules. Après certains pourraient parler d’acte manqué mais en l’occurrence, je ne pense pas. Parce que j’ai sciemment bâclé. Le côté « emballé, c’est pesé ». Les 10 000 idées que j’avais pour promouvoir mon roman que j’ai jamais mises en application. J’ai encore une quinzaine d’exemplaires à la maison à disséminer dans des boîtes à livres. Je ne le fais même pas alors que ça implique de se promener et j’adore ça. Sur Green !, j’en suis au point où je suis plus fière de mon marque-page que du roman. Alors oui, mon marque-page est canon, en toute modestie. Mais si je doute autant de mon écriture, pourquoi j’y vais ? 

Green ! de Nina Bartoldi

Un petit travail sur moi ?

Bref, l’auto-sabotage est une façon confortable de ne pas s’assumer. Oh bah zut, ça a planté, tant pis. Peut-être que la prochaine fois, je ferai mieux. Peut-être en réglant mes petites failles narcissiques, par exemple. Allez savoir. 

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